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Page:Revue pédagogique, second semestre, 1882.djvu/190

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REVUE PÉDAGOGIQUE

et de compléter son intéressante bibliothèque, dont l’État a fait l’acquisition en 1880.

— Dans sa séance du 22 juillet dernier, l’Académie des sciences morales cet politiques a décerné le prix Halphen, destiné à récompenser « la personne qui aura le plus contribué à la propagation de l’instruction primaire, soit par secs livres, soit d’une manière pratique par ses efforts ou son enseignement », à M. L. Maggiolo, ancien professeur dans une école primaire supérieure, ancien principal de collège, ancien inspecteur d’académie, aujourd’hui recteur honoraire, et bien connu par ses recherches sur l’état de l’enseignement primaire en France avant 1789.

— Dimanche 6 août, M. Paul Bert, député, a fait dans la grande salle du palais du Trocadéro, à l’occasion de la fête des Bibliothèques libres de la Seine, une remarquable conférence sur l’instruction civique. Nous détachons de son éloquent discours quelques-uns des principaux passages.

Mesdames, Messieurs,

J’ai pris comme sujet de cette conférence l’Éducation civique. Il paraît que c’est là un mot qui, malgré sa simplicité pleine de grandeur, n’est pas bien compris de tout le monde. Hier encore, au pied d’une des affiches qui annonçaient cette conférence, j’entendais, avec chagrin, quelques jeunes gens se dire : qu’est-ce que c’est que cela, l’éducation civique ?

J’ai recueilli cette question, avec une véritable surprise, de la bouche d’éducateurs mêmes de là jeunesse ; et je l’ai encore entendue — cette fois sans surprise et sans chagrin — en plein Sénat, tomber de la lèvre railleuse de je ne sais quel descendant des émigrés qui disait, en ricanant : L’éducation civique ! est-ce que nous allons apprendre à parler politique à des bambins, à des fils de paysans ?

Et je me disais : Vous êtes des imprudents, vous qui parlez ainsi ; vous qu’on regarde, avec étonnement, au milieu de la société moderne ; vous qui produisez parmi nous l’effet que font ces tas de terre, ces témoins que laissent les ouvriers terrassiers pour montrer l’étendue du travail accompli et l’importance des déblais. Vous êtes des imprudents, car ces fils de paysans et d’ouvriers, en ce siècle de suffrage universel, ce seront vos maîtres demain ! (Applaudissements.) Et vous devriez être les premiers à demander qu’on leur enseignât l’étendue exacte de leurs droits et la limite à laquelle devra s’arrêter leur puissance. (Bravos.)

Et puisque tant de gens paraissent ne pas savoir ce que c’est que l’éducation civique, il faut que je commence par vous en donner une définition. Cette définition, je l’emprunterai aux temps lointains de l’antiquité. Il faut nous reporter par la pensée à Athènes, il y a 2,200 ou 2,300 ans. Par un jour du mois d’octobre, défilent devant le peuple assemblé des jeunes gens de 18 à 20 ans. Ce sont les Éphèbes. On leur remet des armes, et chacun d’eux prononce le