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Page:Revue pédagogique, second semestre, 1882.djvu/558

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REVUE PÉDAGOGIQUE

cité naturelle peut être singulièrement mise à profit pour l’emmagasinement des premières connaissances et le développement des facultés naissantes. Dans ce système, la douzième année devient, non la date d’un recommencement, — car le programme de l’école primaire ne diffère guère aujourd’hui de celui de l’enseignement secondaire qu’en ce qu’il est plus concentré, — mais l’ouverture d’une ère nouvelle de progrès. Ce qui importe par dessus tout, c’est que l’élève reste dans les mains auxquelles elle a été d’abord confiée, qu’elle voie devant elle clairement et sans impatience le chemin à parcourir ; que, de son côté, le maître puisse compter sur les années, se donner du champ, régler sa marche suivant le besoin, semer au moment propice, donner au germe le temps de fructifier, et ne pas se presser de faire la récolte. Le temps et l’esprit de suite font la force du maître et la sécurité de l’enfant. C’est, nous venons de le voir, le principe sur lequel repose l’organisation de toutes les écoles de l’étranger ; notre collège Sévigné est établi sur les mêmes bases. Un établissement d’enseignement secondaire sans classes élémentaires qui lui soient propres est un édifice sans fondations. Ce qui est prévu comme une tolérance ne peut manquer de devenir la règle.

Un autre avantage d’une éducation ainsi conduite, avec ensemble et unité, c’est qu’elle permet, à quinze ans, dit le décret, — nous aurions mieux aimé seize, — non pas d’affranchir la jeune fille de tout travail, mais de la laisser suivre la pente de ses préférences particulières, sans renoncer aux études générales. C’est, à nos yeux, en effet, une idée prévoyante et libérale, que le partage établi, pour les deux années de la seconde période, entre les matières scientifiques et les matières littéraires, chaque section ayant un fond commun de cours obligatoires et une série diverse de cours facultatifs[1]. On reproche aux études univer-


    Mme Necker, l’enfant est en possession de toutes ses facultés naturelles. » — Mme de Maintenon recevait à Saint-Cyr dès six ans. Mme d’Épinay veut qu’on ne commence l’éducation des enfants, filles ou garçons, qu’à douze ans. C’est sa manière de rendre hommage à Rousseau. Mme de Genlis et Mme de Staël posent la même règle. « À douze ans, écrit Mme de Genlis, Adèle n’aura pas d’idées, mais elle n’en aura pas de fausses. » Plus tard elle s’est écartée, et Mme de Staël encore plus qu’elle, des doctrines de l’éducation négative.

  1. Voir le Rapport présenté au Conseil supérieur de l’Instruction publique au nom de la Commission chargée d’examiner le projet d’organisation de l’enseignement secondaire de jeunes filles, par M. Marion, membre du Conseil.