Page:Revue pédagogique, second semestre, 1883.djvu/128

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enfants, en français, les règles de la langue latine et les leur faire apprendre par cœur. Mais j’ai trouvé ensuite, par expérience, qu’il en arrivait un autre inconvénient, c’est que les enfants, comprenant si aisément le sens des règles et ayant l’intelligence des mots, se donnaient la liberté de changer la disposition ou les paroles, prenant tantôt le masculin pour le féminin où un prétérit pour un autre, et qu’ainsi, se contentant de dire à peu près le sens de leurs règles, ils s’imaginaient les savoir aussitôt qu’ils les avaient lues. C’est pourquoi, demeurant ferme dans ce principe du sens commun qu’il fallait leur donner les règles de la langue latine en français, qui cst la seule langue qui leur est connue, j’ai cru que, soulageant leur esprit en leur rendant les choses si claires et si intelligibles, il fallait en même temps arrêter leur mémoire en mettant ces règles en petits vers français, afin qu’ils n’eussent plus la liberté de changer les mots, étant astreints au nombre déterminé de syllabes qui les composent et à la rencontre de la rime qui les leur rend tout ensemble et plus aisés et plus agréables. Il ne faut point chercher l’élégance dans ces vers, mon unique dessein ayant été d’être le plus court et le plus clair qu’il me serait possible. J’espère que les enfants me sauront gré d’avoir travaillé pour les exempter de tant de peines et d’inquiétudes qu’ils ont à apprendre Despautère, et d’avoir lâché de leur changer une obscurité ennuyeuse en une agréable lumière et de leur faire cueillir des fleurs où ils ne trouvaient que des épines. » Lancelot se flatte sans doute un peu ; mais il est certain que sa méthode constituait un progrès considérable sur tout ce qui se faisait alors. C’est également pour diminuer la peine des élèves qu’il fit son Jardin des Racines grecques, « y voyant, dit-il dans sa préface, le moyen le plus propre et le plus facile qu’il ait pu trouver par l’expérience pour apprendre les mots de cette langue. » Faire apprendre des mots était son but, et peut-être faudrait-il s’en souvenir pour apprécier cet ouvrage équitablement.

Des réformes inspirées par le bon sens, contrôlées par l’expérience, en vue d’alléger la peine aux enfants : voilà donc ce qui caractérise dans toutes ses parties l’enseignement de Port-Royal.

Enfin l’on faisait remarquer avec autant de soin la conjugaison