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Page:Revue pédagogique, second semestre, 1883.djvu/174

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REVUE PÉDAGOGIQUE

posés, et les engagera à compléter par des lectures à haute voix l’enseignement de l’école ; il recommandera qu’on lui fasse apprendre par cœur les choses les plus intéressantes. Une mémoire bien garnie sera le livre vivant où l’aveugle puisera les distractions de ses heures de solitude.

L’aveugle de naissance a généralement le caractère gai, mais son infirmité peut le rendre exigeant, volontaire ; l’aveugle qui a vu a le caractère plus difficile. Le maître aura soin d’habituer les élèves à la bienveillance, à la prévenance même à l’égard de leur camarade infirme ; il favorisera des liaisons d’amitié doublement précieuses, parce qu’elles donneront à l’aveugle, avec les joies de l’amitié, des yeux pour le renseigner sans cesse et compléter son développement.

L’aveugle aime la musique. Promptement il répétera les mélodies qu’on lui aura jouées et en éprouvera une réelle jouissance. S’il montre de sérieuses aptitudes, on en fera un jour l’organiste et le maître de chapelle dans l’église du village. Si donc il y a quelque joueur ou joueuse de piano porté de bonne volonté, que l’on ait soin de mettre à profit son esprit charitable. Mais on se rappellera que la musique ne peut fournir qu’exceptionnellement un gagne-pain suffisant, et l’on dirigera de bonne heure l’attention de l’aveugle sur les travaux manuels à sa portée.

Les travaux de tricot, de filoche, de couture sont accessibles aux aveugles. Le maître recommandera à la mère, à la sœur de l’aveugle de les lui enseigner de bonne heure. Il ne bornera pas là ses efforts.

Il y a dans tous les villages des artisans, vannier, cordier, menuisier ou même cordonnier, dont les métiers peuvent être exercés par l’aveugle. Le rempaillage et le Cannage des chaises, la brosserie, certains tissages sont aussi à sa portée, et d’autres métiers encore. La tâche charitable de maître d’école est de mettre au cœur de quelqu’un de ces artisans la bonne volonté nécessaire pour entreprendre l’apprentissage de son protégé. Cet apprentissage n’est point chose exceptionnellement difficile, il ne demande que de la patience.

On voit des aveugles fils d’artisans ne pas même apprendre le métier de leur père, tant est grande l’incurie actuelle. Si l’aveugle