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ULRICH ZWINGLI

plus révolutionnaires que vraiment humanistes. Leur idéal est esthétique encore plus que moral. Ils s’adressent à l’intelligence et à l’imagination plutôt qu’à la conscience.

Zwingli, au contraire, vise non pas la constitution d’une élite d’esprits distingués, mais la transformation d’un peuple tout entier par l’action même des citoyens les plus instruits et les plus pieux. Il veut une réforme démocratique, et, pour soulever la société entière, il entend opérer un renouvellement de l’être moral ou, pour parler son langage biblique, une nouvelle naissance spirituelle. À la base même de l’éducation il place la foi au sens que nous avons indiqué plus haut, c’est-à-dire la consécration de soi-même à Dieu et à la volonté divine, telle qu’il la trouve dans l’Écriture sainte et — c’est là ce qui le distingue tout particulièrement parmi les réformateurs — dans l’inspiration individuelle.

Entre l’éducation de la Renaissance et celle du traité de Zwingli, il y à la même différence qu’entre les philosophes du dix-huitième siècle et les hommes de la Révolution française. Les uns ont remué des idées, les autres ont affirmé des principes moraux destinés à secouer les consciences. Les seconds doivent beaucoup aux premiers, mais les premiers sans les seconds n’auraient jamais transformé la société. L’histoire de la Renaissance en témoigne. Le traité fort peu connu de Zwingli méritait, je crois, d’être présenté au public français soucieux des questions pédagogiques. L’auteur est un digne ancêtre de cette forte race d’éducateurs populaires dont la Suisse allemande a le droit d’être fière.