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Page:Revue pédagogique, second semestre, 1887.djvu/410

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REVUE PÉDAGOGIQUE

l’opinion, et apparaît sous un caractère nouveau ; par l’Examen de la Vie de Jésus il se range au nombre des doctes écrivains qui ont renouvelé l’exégèse. Il s’élance plus loin et embrasse dans un même tableau toutes les cosmogonies ; le Génie des religions semble indiquer la vraie nature de son esprit.

Tout à coup il aborde la politique, l’ardente actualité ; après chacune de ses brochures contre la politique de juste-milieu, ses amis s’étonnent qu’il ne soit pas jeté en prison. Enfin son cours au Collège de France révèle le maître qui transforme l’enseignement et en fait le plus noble sacerdoce. Il se sert de l’Histoire, des Arts, des Littératures pour enseigner la Patrie, la Justice, la Vérité. Il réveille dans les âmes la conscience, il développe l’homme intérieur, et montre aux jeunes gens des écoles le glorieux but de leur vie, la grandeur de la France par l’esprit nouveau. D’autres historiens ont célébré les héros du passé, Edgar Quinet évoque les héros futurs ; son enseignement préparait à la Patrie un avenir meilleur.

L’âpre débat entre l’esprit de progrès et l’ignorance séculaire a été la préoccupation de toute sa vie ; mais il lui a spécialement consacré trois années pendant la République de 1848. Le premier, il proposa la séparation de l’Église et de l’État. Qui s’en souvient ? On vit si vite, on oublie si vite ! Les armes dont on se sert pour repousser l’envahissement du cléricalisme n’ont-elles pas été forgées par Edgar Quinet ? C’est lui qui, invisible, dirige encore les coups et fournit les arguments quand on manœuvre avec justesse et qu’on frappe à bon escient. Pour trancher cette question de vie et de mort, il dépose à la tribune, en 1850, son projet de loi sur l’enseignement laïque. Enfin il écrit le livre qui renferme ses vues sur ce sujet, l’Enseignement du peuple.

Vint l’exil, la grande protestation du droit qui a maintenu la tradition de la République. Ces années furent aussi les plus fécondes en œuvres capitales.

La protestation individuelle ne lui suffit pas. Renouveler sans cesse chez ses concitoyens la douleur de la liberté perdue, fortifier dans les consciences le sentiment du droit et de la dignité humaine, telle fut l’œuvre de l’exilé. Le patriote alarmé, le Français passionnément attaché à son pays lui parle par la voix des Révolutions d’Italie, par la Fondation de la République