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Page:Revue pédagogique, second semestre, 1907.djvu/252

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REVUE PÉDAGOGIQUE

force et d’espoir, M. Schneider a su la discerner, même dans Rome, où l’attention pourrait être captivée par tant d’autres objets. Il n’a pas opposé la Rome moderne aux deux Romes qui l’ont précédée, comme avait fait Zola, qui, d’ailleurs, venu dans une période de crise financière et de désarroi moral, vit surtout les faiblesses dont l’Italie contemporaine s’était incomplètement débarrassée ; M. Schneidera perçu, en ceci comme pour le reste, l’harmonie fondamentale où se réunissent les trois époques de la ville. Ne reconnaît-il point l’haleine enflammée de Cacus dans les fumées de l’usine à gaz, établie au bas de la pente où la tradition localisait la caverne du brigand mythique ? Dans les maisons ouvrières qui se construisent près du Monte Testaccio, il a senti l’âme authentique du vieux quartier, peuplé de manœuvres et de prolétaires. Il ne s’est pas donné le plaisir facile de railler le monument à Victor-Emmanuel dont les travaux énormes et lents couvrent tout un versant du Capitole : il a compris qu’une espèce de nécessité naturelle pousse aux constructions grandioses les occupants de ce sol (ceci était bien noté par Zola), et qu’il appartient à l’Italie nouvelle de mettre sur la ville une marque que le temps rendra vénérable à son tour. La statue de Garibaldi, sur le Janicule, est très belle ; M. Schneider ne craint pas de le dire. Remercions-le de ce courage. Imitons-le à l’occasion : avouons que si les bords du Tibre, tels que les représentent les aquarelles d’il y a quarante ans, étaient d’un désordre pittoresque, il est bien commode aussi de se promener sur des quais larges et de se savoir à l’abri des inondations ; déclarons que nul quartier moderne, à Rome, ne manque tout à fait d’agrément pour celui qui n’y apporte point de prévention hostile ; et reconnaissons aux vivants le droit de continuer les morts.

Car l’effort de la jeune Italie n’est point une rupture révolutionnaire avec le passé : il s’agit au contraire de reprendre avec une vigueur nouvelle d’antiques traditions, pendant quelque temps affaiblies. Ce qui a soutenu l’Italie, depuis Rienzi, à travers une horrible histoire de tyrannies et de guerres, c’est le souvenir du nom romain : la même pensée filiale suscite aujourd’hui l’énergie de la nation. La Maremme toscane, sous l’effort héroïque des défricheurs, redeviendra peu à peu la région habitée et féconde qu’elle était au temps des Étrusques. Ostie est patiemment