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analyses. — desdouits. La Philosophie de Kant.

dans l’œuvre de Kant ; mais il la considère comme une contradiction avec le reste du système, tandis que, pour nous, la théorie de l’expérience, comme la doctrine de la finalité, comme les conceptions religieuses de Kant ne sont rigoureusement que des postulats de la loi morale.

Nous sommes forcés de borner à ces réflexions sommaires notre appréciation de la critique très-étudiée et très-détaillée, qui constitue la seconde partie du livre de M. Desdouits.

La troisième partie, qui traite de l’influence de Kant sur ses successeurs, est très-peu développée et contient d’assez graves inexactitudes. Il nous paraît bien hasardé de faire de Beck (p. 391) un disciple sans réserve de Kant, alors qu’il est surtout connu pour sa polémique contre la doctrine de la chose en soi. — M. Desdouits trouve que la critique de Jacobi est absolument concluante contre Kant (p. 402). Nous aurions voulu qu’il se préoccupât un peu de la réponse que Kant faisait à Jacobi et à d’autres dans des opuscules comme les suivants : « Was heisst sich im Denken orientiren», 1786 ; « Qu’est-ce que s’orienter dans la pensée ? », et « Von enim neuerdings erhobenen vornehmen Tone in der Philosophie », 1796 ; « Du ton présomptueux qu’on a récemment pris parmi les philosophes. » — Est-il bien vrai que Herbart représente la réaction platonicienne contre le Kantisme ? Ce rôle n’appartient-il pas plutôt à Schelling et à Hegel ? Ne serait-il pas plus juste de dire que l’originalité de Herbart a été de vouloir concilier Kant et Leibniz, le moi de l’un et la monade de l’autre ? — Pourquoi l’auteur écrit-il Schopenhauer ? Est-il exact de traduire ainsi le titre du grand ouvrage de ce philosophe : « Du monde de la volonté et de la représentation ? » (357). — Enfin, n’est-ce pas un rapprochement forcé que celui qui unit (p. 421) Schopenhauer d’un côté à Hume, de l’autre à Auguste Comte ?

La conclusion développe contre le positivisme et la morale indépendante des arguments qui ne sont ni bien nouveaux, ni bien concluants. — Signalons en terminant, dans cette conclusion, la contradiction, trop évidente pour qu’il faille y insister, que renferment les lignes suivantes (p. 429) : « La vraie méthode ne serait-elle pas dans la croyance à l’unité indissoluble de la raison spéculative et de la raison pratique, dans la réduction des axiomes de la raison, des jugements synthétiques à priori, à l’idée du bien, qui les suppose tous et qui en est le principe suprême ? La philosophie qui suivrait cette méthode, tout en combattant la critique, lui ferait cependant une large part, puisque c’est, en définitive, sur l’idée morale qu’elle s’appuierait pour justifier tous les jugements et tous les concepts de la raison pure. » Comment combattrait-on la critique, en subordonnant, comme elle, la raison théorique à la raison pratique ?

Nous avons cru par la sévérité de notre critique mieux servir les intérêts de l’érudition et de la vérité philosophique, et en même temps témoigner de notre sérieuse estime pour l’ouvrage substantiel et très--