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(par exemple : enfant » garçon, adolescent, homme, vieillard), doivent être tracés d’avance par le principe qui détermine à chaque instant l’intuition inconsciente ; il faut donc qu’ils soient préformés dans le principe formel logique. J’ai montré ailleurs[1] que cette préformation prédestinante des degrés du développement doit être seulement comprise dans le sens d’éventualités possibles et non dans le sens d’idées actuelles. Sans un principe logique qui dirige le développement, un développement serait impossible, même dans le sens le plus modeste du mot ; même un cycle (graine, arbre, floraison, fruit, etc.), serait impossible, car celui-ci exige déjà un ordre logique et une séparation des différentes phases. Si ces phases ou ces degrés n’étaient pas contenus dans le logique déterminant, celui-ci ne pourrait pas les développer et les réaliser dans le processus ; la pluralité empirique des degrés doit être contenue implicitement dans l’unité du principe qui les détermine, sans cependant impliquer que ce principe (à titre d’inconscient) doive nécessairement en avoir connaissance.

La partie qui dans le processus développe son contenu idéal est elle-même quelque chose d’immuable, mais le contenu ou l’objet de son intuition inconsciente idéale à réaliser, doit être quelque chose qui se modifie constamment, quoique lentement, dans le cours du processus, comme il est prouvé par le fait que la réalité déterminée par lui se modifie constamment. La protestation de Bahnsen à ce sujet serait tout-à-fait incompréhensible, si la confusion qu’il commet entre les méthodes de la marche discursive et abstraite de la pensée et la progression de l’intuition inconsciente, absolument concrète qui détermine le développement réel, ne donnait pas la clef de l’explication. Si le contenu actuel d’une idée concrète était réellement, d’après l’opinion que Bahnsen m’attribue, quelque chose d’immuable, une unité sans degré, alors il serait tout-à-fait impossible de se servir d’une telle idée pour expliquer ce qu’elle doit expliquer, à savoir le progressus ; elle n’aurait absolument aucune valeur, elle serait donc une hypothèse sans aucun fondement légitime. Comme Bahnsen ne comprend nullement comment le processus réel dérive d’une progression contenu de l’intuition inconsciente concrète, il ne comprend pas non plus qu’il faille absolument admettre un principe déterminant pour le comment de cette progression, c’est-à-dire un principe logique formel comme moment formel de l’Idée, qui décide en même temps du contenu total de la réalité. Mais, outre la variabilité, il faut encore attribuer à l’Idée

  1. Philosophie de l’Inconscient, 7e édit., II, 40-445.