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traduction, revue par l’auteur lui-même, offre donc toutes les garanties qu’on pourrait désirer. On ne peut que féliciter M. Boutroux et l’engager à persévérer dans son entreprise. S’il parvient à la conduire à bonne fin, il aura rendu un très-grand service, dont lui sauront gré, chez nous, tous les amis de la philosophie et de son histoire.

Sans entrer dans un examen détaillé ni approfondi de cette partie de l’ouvrage de M. Zeller qui est mise aujourd’hui sous nos yeux, nous voudrions cependant la faire connaître au lecteur dans ses points principaux, en nous attachant particulièrement à ce qui doit être regardé comme le côté philosophique de cette histoire.

Le livre de M. Zeller débute par une Introduction générale, où sont exposées ses vues sur l’histoire de la philosophie, et où il fait connaître le but, la matière et la méthode de son ouvrage.

L’auteur s’attache d’abord à définir le concept de la philosophie, afin de pouvoir distinguer nettement les œuvres qui doivent former le domaine de son histoire, délimiter et mesurer la carrière que lui-même doit parcourir en nous retraçant, dans son développement, l’histoire de la philosophie grecque.

Nous n’avons aucune objection à faire sur ce premier point, qui nous paraît traité avec une clarté et une précision suffisantes. La définition de la philosophie comme « mode d’activité purement spéculatif ne s.e « rapportant qu’à la connaissance de la réalité » peut paraître un peu vague. « La philosophie est une véritable science, distincte des autres sciences seulement parce que celles-ci s’attachent à un objet particulier, tandis que la philosophie se propose d’étudier l’ensemble des choses, de connaître l’individuel dans son rapport avec l’universel, de trouver dans les lois de celui-ci l’explication de celui-là ? » — Quoique cette manière d’envisager de la philosophie n’ait rien de neuf, elle nous paraît suffire à l’historien pour tracer le domaine de son histoire, pour exclure les œuvres de l’esprit humain qui sont en dehors et appartiennent à d’autres histoires. Ce n’est pas, ajoute l’auteur, qu’il faille détacher cette histoire et ce qui en est l’objet particulier de l’ensemble de la culture générale ; mais on doit se renfermer dans ces justes limites.

Le cadre ainsi tracé, vient la question de la méthode. L’auteur n’hésite pas à condamner la méthode spéculative d’une construction à priori de l’histoire. Lui-même, autrefois hégélien, en fait très-bien ressortir les dangers et les vices. Cette partie de la théorie et de la critique de M. Zeller a été trop bien exposée par son traducteur pour que nous devions insister. Mais nous ne pouvons nous défendre ici de quelques remarques. Puisqu’il s’agit de la partie philosophique du livre de M. Zeller, il ndus semble qu’il s’est écarté beaucoup moins qu’il ne croit, sinon de la méthode de Hegel, au moins de ses résultats. M. Zeller nous dit (p. 13) : « Ainsi la tentative de Hegel est vaine en fait et en droit. Et la seule chose qu’on en puisse retenir est, d’une manière générale, la conviction que le développement historique est au fond