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richet. — méthode de la psychologie physiologique

de cet ébranlement a disparu. J’ai pu démontrer ce fait par des expériences d’autant plus rigoureuses, que j’ai eu recours à la méthode expérimentale et non à la méthode logique. Une excitation répétée dix fois en un court intervalle de temps, agit plus que cette même excitation isolée. Tout se passe comme si les excitations successives s’accumulaient de manière à produire une somme d’effets. Le mot phosphorescence ne peut donc être regardé comme l’expression réelle de la vérité, mais on peut dire sans témérité qu’il se passe dans le cerveau quelque chose d’analogue.

Je ne dirai rien des autres critiques que le livre de M. Luys a inspirées à M. Egger. La psychologie scientifique et la méthode expérimentale n’en sont pas plus responsables que la physique n’est responsable d’un livre écrit par un physicien, ou la chimie d’un livre écrit par un chimiste. Dans l’intérêt de la vérité, il faut que cette confusion cesse.

En somme, si l’opinion exclusive de M. Egger venait à triompher, ce serait un pas en arrière. Laisser la science de l’homme aux logiciens qui dédaignent la méthode expérimentale et les résultats de cette méthode, c’est le contraire du progrès. Ceux qui plus que tous autres sont à même d’étudier et de connaître les facultés de l’intelligence, ce sont ceux qui, cherchant la vérité dans le domaine des faits, étudient les fonctions de l’organe de l’intelligence. C’est aux aliénistes comme Esquirol, c’est aux physiologistes comme Claude Bernard, non pas à l’exclusion des philosophes, mais de concert avec ceux-ci, qu’il appartient de fonder une science qui n’existera que si elle se soumet à l’autorité suprême de l’observation et de l’expérience.

Dr Charles Richet.