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herbert spencer. — études de sociologie.

du monde fournit d’autres cas où nous voyons cette souillure corporelle soigneusement développée comme forme de propitiation. « Dans les régions du Congo, dit Burton, on se prosterne, on baise la terre, on se couvre de poussière le front et les bras devant tout Banza ou chef de village. » Le même auteur rapporte que la salutation dahomane consiste en deux actions : celle de se prosterner et celle de répandre du sable ou de la terre sur la tête. De même nous lisons que, « en saluant un étranger, les Kak’randas, sur le Niger, s’inclinent presque jusqu’à terre et jettent plusieurs fois de la poussière sur leur front. » À propos des manières pointilleuses des Balondas, Livingstone dit : « Quand les inférieurs rencontrent leurs supérieurs dans la rue, ils se jettent à genoux et frottent de la poussière sur leurs bras et leur poitrine. Un homme qui parlait à un personnage à l’aspect vénérable ramassait toutes les deux ou trois secondes un peu de sable et s’en frottait la poitrine et la partie supérieure des bras… Quand ils désirent être excessivement polis, ils apportent une quantité de cendres ou de terre de pipe dans un morceau de peau ; ils en prennent des poignées et s’en frottent la poitrine et le devant de la partie supérieure des bras. »

Certains exemples nous montrent que cette cérémonie subit des abréviations comme les autres. Livingstone dit à propos de ces mêmes Balondas : « Les chefs se frottent les bras, mais ils font seulement semblant de ramasser du sable. » Sur le bas Niger, « les habitants, quand ils se prosternent, se couvrent plusieurs fois la tête de sable ; du moins ils font comme s’ils s’en couvraient. Les femmes, à la vue de leurs amies, s’agenouillent immédiatement et font semblant de répandre alternativement du sable sur chaque bras. » Il est également clair qu’en Asie cette cérémonie était et est encore pratiquée dans la même intention. Elle fut adoptée, comme expression d’humilité politique, par les prêtres, qui, allant supplier Florus d’épargner les Juifs, se présentèrent « la tête fortement saupoudrée de poussière et le sein couvert de vêtements déchirés ». On peut voir actuellement en Turquie des abréviations de cet hommage. À une revue, même les officiers à cheval, en saluant leurs supérieurs, « font semblant de se jeter de la poussière sur la tête, » et des gens du peuple, en voyant partir une caravane, exécutèrent la pantomime de se jeter de la boue par-dessus la tête. »

Les annales des Hébreux prouvent que ce signe de soumission était fait devant les personnes invisibles aussi bien que devant les personnes visibles. Non-seulement on se saignait, on se marquait la chair, on se coupait les cheveux aux funérailles, mais on se mettait encore des cendres sur la tête. On en faisait autant pour attirer