Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, VI.djvu/454

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
444
revue philosophique

d’hui, les programmes de l’enseignement le plus élémentaire la placent comme introduction à l’étude des sciences naturelles.

Cette question, M. Chauffard l’aborde en spiritualiste convaincu, pour qui aucune confusion n’est possible entre l’ordre vital et l’ordre minéral ou inorganique. Il décide sans discuter.

Tout au contraire. Cl. Bernard discute sans décider. Il réunit les pièces du procès, mais il ne le juge point, parce qu’en effet l’issue en est indifférente à la physiologie. La confusion est pratiquement impossible entre le vivant et l’inanimé, et cela suffit pour que le physiologiste puisse procéder à ses études. Que la différence soit plus ou moins profonde entre le corps brut et le corps animé, qu’elle soit essentielle ou qu’elle soit seulement formelle, c’est un point que la science d’aujourd’hui est impuissante à fixer : il appartient peut-être au médecin philosophe, mais non à l’homme de science positive, d’en raisonner. Ces réserves faites, il est juste de reconnaître que les barrières élevées par les anciens naturalistes entre le règne organique et le règne inorganique ont été singulièrement ébranlées sur bien des points et même complètement renversées sur d’autres points.

Quels sont les traits qui séparent le corps vivant du corps brut et qui par là même caractérisent la vie ? On a successivement signalé la composition chimique, l’organisation, la nutrition, l’évolution, la tendance à l’acquisition d’une forme spécifique, la génération.

Buffon a pu croire à l’existence d’une matière spéciale pour l’être vivant, à un corps simple vital. Les progrès de la chimie ont presque immédiatement ruiné cette hypothèse et démontré qu’il n’y a point d’autre espèce de matière dans les organismes que dans le monde minéral.

On a alors invoqué un autre caractère, l’organisation. Mais qu’est-ce que l’organisation ? Nous ne sachons pas qu’on en ait donné une définition satisfaisante qui ne revienne fatalement à celle-ci : c’est la constitution physique particulière de la matière vivante. Or, jusqu’à ce que l’on ait déterminé les propriétés physiques et la formule chimique du plus simple et du plus universel des corps vivants, c’est-à-dire du protoplasma, l’on ne saura point ce que c’est que l’organisation. Notre ami regretté. Papillon, avait cru trouver dans les travaux de Ch. Robin la solution de cette difficulté ; il a écrit quelque part : « Au lieu d’être homogène et symétrique dans tous les points de sa masse, l’élément organique est constitué par l’association d’un certain nombre de substances diverses où le carbone prédomine, et qu’on appelle des principes immédiats organiques. » Association de trois ordres de principes immédiats, absence d’homogénéité et