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dastre. — le problème physiologique de la vie

festations de la vitalité, de fixer son rôle et ses rapports avec les phénomènes. — Si l’on n’a fait cela, on n’a rien fait qu’avancer une formule vide : on n’a pas donné de réalité, pas de corps à l’idée de l’unicisme, et cette doctrine reste comme le vêtement flottant et banal qui s’adapte aussi bien à toute espèce de personnages. On se rencontre ainsi dans un apparent accord avec les écoles les plus diverses, spiritualistes et matérialistes.

L’unicisme, en effet, en confondant en une seule toutes les sources de l’activité humaine, ne prend point parti, par cela même, dans la grande querelle qui agite la philosophie moderne. Si l’on est spiritualiste comme M. Chauffard, en même temps qu’uniciste, on en sera quitte pour attribuer au principe commun de l’activité humaine, à l’âme, deux modes incomparables et irréductibles, le mode vital et le mode psychique. Si l’on est matérialiste, l’on confondra les modes ainsi que l’on confond les principes, de manière à ramener à un seul ordre les phénomènes psychiques et vitaux entre lesquels on ne verra plus qu’une différence de degré, la pensée n’étant qu’un maximum du mouvement vital ou le mouvement qu’un minimum de la pensée.

Il faut avouer que c’est une bien commode invention des philosophes, que celle des principes et des modalités : c’est le moyen d’arranger toute querelle, de dissimuler tout désaccord. On corrige avec les modalités les concessions auxquelles on est obligé sur le principe ; on reprend avec le principe ce que l’on accorde sur les modalités. C’est par des confusions de ce genre, en profitant de l’indétermination de termes qui ne sont caractérisés ni définis, que l’on a essayé de relever de nos jours l’animisme ancien, l’animisme de Stahl, c’est-à-dire l’unicisme spiritualiste.

On sait que l’animisme, tel qu’il a été formulé par Stahl, considère l’âme comme le principe recteur unique. L’âme immortelle, force intelligente et raisonnable, est l’artisan et le constructeur du corps (âme architectonique) ; elle gouverne la substance corporelle, la met en mouvement, la dirige avec intelligence ; elle agit sans intermédiaires sur les organes ; elle fait battre le cœur, sécréter les glandes, contracter les muscles et s’exécuter toutes les fonctions. La vie est un des modes de fonctionnement de l’âme : c’est son acte vivifique. Les maladies sont des erreurs ou des défaillances de ce principe intelligent : Stahl dit quelque part « une conséquence du péché originel ». La conception animiste a succombé sous le grave reproche que lui ont adressé les vitalistes et qui n’est pourtant pas le plus, grave qu’on lui puisse faire ; tandis, en effet, que l’âme agit avec conscience, réflexion, volonté dans l’ordre intellectuel, il est clair