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pas vraie, car elle n’aurait pas embrassé l’univers tout entier et n’en aurait fait qu’une analyse incomplète.

Mais il est temps d’aborder dans le détail l’examen du livre qui nous occupe. Il se subdivise en trois parties principales : l’analyse des aspects, celle des éléments et celle des phénomènes. Nous les étudierons séparément.

I

La philosophie se distingue des sciences ; mais elle ne peut en être totalement séparée. Il y a cinq manières, dont une seule doit être vraie, de faire cette distinction. Les uns, ce sont particulièrement les’ positivistes anglais, donnent tout aux sciences et ne laissent à la philosophie que les vagues conjectures sur la nature des choses dont les hommes sont obligés de se contenter avant d’avoir trouvé les vraies méthodes de recherche. L’emploi de ces méthodes étend tous les jours le domaine des sciences et restreint celui de la philosophie, qui n’a réellement droit à aucune place dans le monde intellectuel.

Pour d’autres, les disciples d’A. Comte, le progrès des sciences et leur subdivision croissante rendent possible et nécessaire la coordination, la systématisation de ces aperçus nouveaux et divers : c’est là l’œuvre propre de la philosophie.

En troisième lieu, la philosophie a pour objet de découvrir l’absolu, et les sciences deviennent scientifiques seulement lorsqu’elles sont déduites des lois de cet absolu. C’est la doctrine hégélienne.

MM. Lewes et Spencer, avec quelques différences, ont adopté une quatrième opinion. Ils admettent la définition d’A. Comte ; mais ils regardent en outre comme une fonction essentielle de la philosophie de débarrasser le domaine scientifique de toutes les entités ontologiques nées d’une imagination encore déréglée ou d’un système réfléchi.

Enfin, d’après M. Hodgson, la philosophie est plus que la coordination des sciences et plus aussi que la science toute négative dont parlent MM. Lewes et Spencer : elle a en propre un contenu positif, une méthode positive, sans prendre ces mots dans un sens ontologique ou transcendant, et ce contenu, cette méthode sont la permanente raison de la philosophie qui existe ainsi à titre de science particulière.

En réalité, l’histoire de la philosophie ainsi comprise ne peut se confondre avec l’histoire des systèmes philosophiques. Ceux-ci ne