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espinas. — philosophie expérimentale ex italie

de conception systématique. Venons maintenant à la démonstration directe de la thèse négative de l’auteur.

Les trois premiers arguments ne sont que des engagements d’avant-garde (incompatibilité entre les attributs de Dieu et le libre arbitre ; l’idée de la liberté n’est pas inséparable de celle de volonté ; les lois de la logique régissent nécessairement l’ordre de nos pensées, par conséquent nos délibérations et nos résolutions) ; les deux derniers, d’autre part (appel à la statistique et à la physiologie), n’ont pas d’autre destination que de confirmer des conclusions acquises : c’est donc sur l’argument iv (le principe de causalité exclut le libre arbitre) que porte tout l’effort de la preuve. Là est le point central de la composition. Et en effet la clef du problème, c’est l’idée de cause. Le livre veut être jugé sur le développement donné à cette idée.

Or, quand on lit cette longue série de pages (153-314), coupées de citations interminables, on croit assister à une opération militaire conduite avec des forces disparates, sur une ligne immense, par un chef inexpérimenté à qui l’unité de l’action échappe et qui n’a pas ses troupes dans la main. Nous ne pouvons songer à reproduire cette démonstration, qui en contient une multitude d’autres, dans un détail suffisant pour que ce qu’elle a de force ne se perde pas tout à fait. En voici l’économie. L’auteur établit d’abord que la causalité se réduit à la succession nécessaire de phénomènes dont la liaison est constante dans l’expérience ; il montre que toute idée de production, de création de l’effet par la cause doit être bannie de ce concept : la cause et l’effet sont Mes d’une manière indissoluble, telle que l’effet suppose invinciblement une cause de même sorte ou du moins proportionnée, et que l’effet soit inévitablement la cause, une fois qu’elle est donnée. Bref, M. Enrico Ferri reproduit l’analyse du concept de cause qui prévaut dans l’école positive, avec les caractères que lui ont prêtés Stuart Mill et Ardigò, et en empruntant le plus souvent leurs termes mêmes. Il part de ce principe pour exclure toute intervention de causes surnaturelles dans le tissu des phénomènes soit de la part de la cause première des métaphysiciens, soit de la part des causes libres des psychologues spiritualistes. Il conclut enfin à la négation du libre arbitre. Dans ces développements à phases multiples, il n’est guère d’hypothèse favorable au libre arbitre qu’il ne rencontre et qu’il ne combatte. Ce qui nous a le plus intéressé cependant dans cette étude, d’une lecture pénible, parce qu’elle aurait besoin d’être condensée et débarrassée des épisodes qui la traversent, ce sont les passages où l’auteur combat les philosophes de son bord et même ses maîtres, entre autres R. Ardigò lui-même. Le premier de ces passages est destiné à réfuter la théorie du hasard