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tranchantes auxquelles ils se portent tout d’abord. Telle est lamonocrraphie de M. G. Lombroso : L’Uomo delinquente, le Criminel. Médecin, anthropologiste, expert médico-légal, visiteur assidu des prisons et des asiles d’aliénés, possesseur d’un musée où toutes les particularités de la vie des criminels sont représentées depuis leurs crânes et leurs photographies, jusqu’à des spécimens de leur écriture, connaissant à fond la littérature du sujet en Allemagne, en Angleterre, en France et en Italie, dégagé de toute conception systématique et humanitaire, enfin, comme un homme qui a vu de ses yeux le péril, très-pénétré de la nécessité absolue où est la société de s’en défendre, l’auteur réunissait toutes les conditions pour donner, si vraiment cela est possible, une solution satisfaisante à ce terrible problème de la responsabilité dans le crime et de la légitimité de la peine.

De tels ouvrages ne se prêtent guère à l’analyse. S’il nous fallait accompagner M. Lombroso à travers tous les chapitres où il examine minutieusement, avec toutes les ressources de l’anthropométrie et la précision de la statistique, la complexion physique et la physionomie des criminels, leurs tatouages, leur sensibilité, leurs passions, leur penchant à la récidive, leur religion, leur inteliigence et leur instruction, leur argot, leur écriture, leur poésie, les causes du crime (climat, race, civilisation, alimentation, hérédité, âge), les rapports avec la folie, les associations de malfaiteurs, enfin la thérapeutique préventive et répressive qu’il convient d’appliquer à cette maladie sociale, nous aurions à résumer dans quelques lignes l’expérience et la réflexion de toute une vie, tâche évidemment impossible. La science en acte est dans les faits d’où elle sort ; celui qui veut la posséder doit se mettre en présence de ces faits, se pénétrer des impressions multiples qui naissent à leur contact, vivre en un mot intimement uni par tous ses sens à la réalité qu’il veut connaître. A défaut de cette expérience personnelle, plus difficile à se procurer en cette matière qu’en toute autre, il n’y a pour nous qu’un moyen de nous rapprocher de ce résultat : c’est de lire dans tous ses détails le travail de M. Lombroso ; c’est surtout de nous livrer à un examen attentif des nombreuses expertises racontées à la fin du volume dans un appendice de 200 pages in-8° de petit texte. Nous engageons vivement nos lecteurs à se procurer ce plaisir : pour nous, nous voudrions que cet ouvrage fût traduit et devint le guide préféré de nos procureurs et de nos juges d’instruction. Nous ne pouvons que le caractériser brièvement, en indiquant ses conclusions principales.

Les criminels forment une classe à part ; mais quiconque a tué volontairement ne fait pas partie de cette classe par cela seul. Il y a des crimes d’impulsion, crimes isolés, dus à l’emportement d’une