être faux. » Il faut donc bien distinguer les aspects des éléments et des conditions.
Si la conscience comprend trois éléments qui la constituent, le temps, l’espace, la sensation, si les mêmes éléments comparent les êtres et les phénomènes, la conscience et les êtres sont mutuellement les deux aspects subjectif et objectif, nous le savons déjà, et le mot phénomène sert à marquer l’union de ces deux aspects, car il désigne à la fois les choses qui apparaissent, les êtres dans la conscience, et donne à entendre que les êtres et la conscience sont inséparables. Il remplit, pourrait-on dire, vis-à-vis de ces deux termes, le même rôle que le troisième postulat de la logique par rapport aux deux premiers. Ce serait mal comprendre la distinction de ces deux aspects que de répartir entre eux, par exemple à la manière de Kant, l’élément matériel et l’élément formel, d’assigner, comme dans la Critique de la raison pure, une origine a priori au temps et à l’espace, une origine a posteriori aux impressions sensibles, de considérer enfin le temps et l’espace comme formant l’aspect subjectif et la sensation l’aspect objectif des phénomènes. D’ailleurs introduire la question d’origine, c’est introduire la question de conditions. Par une confusion semblable, on parle quelquefois des facteurs de la connaissance, et l’on entend par là tantôt un élément, tantôt une condition des phénomènes. On se met ainsi dans l’impossibilité d’analyser, comme on le devrait, ces deux notions distinctes. Or la philosophie proprement dite, c’est-à-dire la métaphysique, a pour objet l’analyse des éléments, l’étude des aspects, et non la recherche des conditions. Elle traite de la nature de ce qui est, et non de son histoire ou de sa genèse. Platon l’avait déjà indiqué : ἕν μέ τι γένεσιν πάντων, τὴν δὲ οὐσίαν ἕτερον ἕν. Mais on avait depuis négligé cette distinction, et c’est surtout pour l’avoir remise en honneur que M. Hodgson prétend au mérite de proposer un nouveau système de philosophie.
Mais l’étude de la nature et celle de l’histoire des phénomènes ont des rapports entre elles, et, dans la Philosophie de la réflexion, un chapitre entier est consacré à l’examen des problèmes que ces rapports font naître. Les uns sont relatifs aux doutes des Éléates sur la possibilité même de concevoir le temps et le mouvement, et à l’infinité du temps et de l’espace ; les autres se rapportent aux postulats, aux axiomes et aux hypothèses.
Si le mouvement, le changement ne peut être conçu, le monde phénoménal tout entier perd toute réalité ; il est impossible d’en faire l’histoire ; il ne reste qu’un noumène invariable, substratum réel d’apparences changeantes, et c’est, d’après les Éléates, la seule théorie qui soit vraie. — D’abord le temps est un élément universel et néces-