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nolen.les maîtres de kant

pose à la seule raison ; et que la divinité et la religion du Christ non-seulement s’appuient sur l’autorité irrécusable des faits, mais satisfont à toutes les exigences de l’entendement et de la conscience. Le christianisme de l’auteur, comme celui des piétistes, se complaît à mettre en relief la signification morale de la doctrine révélée, à insister sur la corruption originelle, la régénération par l’effort personnel, le salut par les œuvres. Comme celui de Schultz, le piétisme de Knutzen est sensé et humain : il n’admet pas que la contrition du pécheur s’exagère jusqu’à briser les ressorts de l’action, et que les gémissements du repentir et les pratiques de la mortification volontaire fassent oublier à l’homme ce qu’il doit à la nature et à ses semblables. Mais ce qui est plus nouveau encore, c’est la polémique dirigée contre les déistes anglais, contre Toland et Tindal particulièrement. Elle prouve, à tout le moins, l’érudition étendue de Knutzen et la connaissance approfondie qu’il avait de la littérature anglaise de son temps.

Dans les écrits précédents, Knutzen n’hésite pas, nous le voyons, à mettre la philosophie au service de la foi révélée : il est encore plus théologien que philosophe. Les ouvrages qui vont nous occuper nous le montreront plus dégagé des préoccupations religieuses ; et nous permettront de mieux apprécier en lui le métaphysicien et le disciple original de Wolf.

La dissertation de 1735, « Commentatio philosophica de commercio mentis et corporis per influxum physicum explicando, » est l’œuvre capitale de Knutzen en philosophie. Elle parut en seconde édition, 1755, sous le titre de « Systema causarum efficientium. »

Le problème qu’elle discute captivait ou plutôt même passionnait depuis plusieurs années le public des Universités. On sait le rôle considérable que joue la doctrine de l’harmonie préétablie dans la métaphysique de Leibniz. Le sens profond et subtil de cette conception, les explications assez peu conséquentes entre elles que l’auteur en avait données successivement, n’étaient propres qu’à égarer les disciples et les interprètes. Wolf lui-même, qui fit tant pour éclaircir, pour coordonner, pour populariser les enseignements du maître, n’avait saisi ni la signification vraie, ni la portée de l’harmonie préétablie. De là une exposition et un commentaire superficiels et inexacts de la monadologie, où rien ne survit de la brillante et profonde imagination de celui que Herder appelait « le poète en métaphysique ». Il semble que l’harmonie préétablie ne soit, aux yeux de Wolf, qu’une pièce indifférente du système : hypothèse préférable sans doute à celle de l’influx physique ou de l’occasionalisme, mais que l’esprit n’est pas tenu rigoureusement d’admettre. L’har-