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ANALYSES ET COMPTES RENDUS


Helmholtz. Les faits dans la perception (Die Thatsachen in der Wahrnehmung). Discours prononcé à l’Université de Berlin, le 3 août 1878. (Berlin, Hirschwald, i879.)

C’est toujours un événement qu’un discours de Helmholtz. L’éminent professeur vient d’ajouter un important chapitre à la série déjà si riche de ses « Essais scientifiques et populaires ». Il y résume et précise les idées qu’il a tant de fois présentées dans ses livres et ses articles de revues, sur la perception sensible et en particulier sur nos perceptions d’étendue.

Le problème qui occupait les esprits philosophiques vers 1810, au moment de la fondation de l’Université de Berlin, est encore celui qu’agitent aujourd’hui les intelligences capables d’associer dans leurs recherches le goût de la spéculation et celui de la science positive. Qu’est-ce que la vérité pour l’intuition sensible et pour l’entendement de l’homme ? Dans quel sens nos représentations correspondent-elles à la réalité ? La philosophie et la science discutent ce problème, à des points de vue différents : la première s’attache surtout à mettre en lumière la part de l’esprit ; la seconde, celle des objets dans la formation de la connaissance. La théorie de la perception sensible, l’analyse des principes de la géométrie, de la mécanique et de la physique, ont appelé l’attention sur cette question.

Kant avait donné le nom de formes transcendantales aux formes, antérieures à toute expérience, que doit prendre la matière de nos représentations, pour être intelligible à la pensée. Avant lui, Locke avait distingué la part du corps et celle de l’esprit dans les sensations, par sa théorie des qualités premières et des qualités secondes. Les recherches de Jean Müller ont confirmé, par une démonstration physiologique irréfutable, les théories des philosophes ; et la doctrine des énergies spécifiques des sens en a fini décidément avec les illusions du réalisme vulgaire.

On peut distinguer dans les sensations deux différences essentielles, l’une d’espèce, l’autre de degré. La première sépare, sans permettre de les comparer, les sensations propres aux divers sens : ainsi on ne songe à aucun rapprochement entre le doux et le bleu ou le rouge. Mais les différences de degré qui existent entre les diverses sensa-