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l’équilibre de l’âme. Seulement, ce qui la distingue essentiellement, c’est que les activités d’où elle résulte sont à la foie organiques et physiques.

Le livre II est consacré à déterminer avec précision les éléments et l’essence de la passion. Pour cela, au lieu de recourir à l’analyse psychologique, l’auteur préfère consulter d’abord l’histoire (p. 138-181). C’est dans les théories des philosophes qu’il recueille « les éléments essentiels dont la passion se compose. » Après avoir demandé tour à tour une consultation à Platon et Aristote, à Descartes, Leibniz et Spinoza, sans oublier les Stoïciens, M. Maillet se tient pour satisfait : « Les divers éléments de la passion, dit-il, sont dès a présent entre nos mains. » Il ne reste qu’à donner plus de rigueur scientifique et une forme plus moderne aux données historiques de la philosophie.

Quels sont donc les éléments de la passion ? M, Maillet en distingue trois, qui appartiennent à trois ordres différents de conceptions : la métaphysique, la physique et la psychologie. Les deux premiers représentent la part de la fatalité dans la passion, le troisième la part de la liberté.

Comment ne pas être surpris tout d’abord que la définition de ce que M. Maillet appelle l’élément métaphysique de la passion le conduise à se demander quelle est la loi universelle des choses, à discuter l’idée du progrès, l’idée du devenir, et enfin l’idée du rythme, c’est-à-dire d’une sorte de progrès intermittent, d’une alternance continue et mesurée ? Autant l’esprit serait satisfait de l’intervention d’une métaphysique sage et rigoureuse qui rattache les faits à leurs principes immédiats, autant il est déconcerté, quand il voit apparaître, à propos d’une analyse psychologique telle que l’étude des passions, des principes vraiment trop éloignés, des considérations trop générales, des lois qui embrassent toute l’humanité et tout l’univers ? Au-dessus de l’activité libre et consciente de l’homme, il y aurait, à en croire M. Maillet, un courant d’activité instinctive, impersonnelle, spécifique, qui, tantôt se ralentissant, tantôt s’animant et se déroulant avec agitation, serait le principe premier soit du calme et de la paix, soit du trouble et du désordre de l’âme. Dans cette hypothèse, le caractère individuel devient une ondulation à grande amplitude du rythme universel ; la passion au contraire est une ondulation courte et imprévue (p. 194). N’est-il pas vrai que l’auteur ici enfle un peu ses conceptions et que l’esprit hésite à le suivre dans les affirmations sans preuve de sa métaphysique indiscrète ?

Avec l’élément physiologique et l’élément psychologique de la passion, nous revenons à des observations plus positives. M. Maillet résume les travaux de la physiologie moderne sur le siège des passions, sur la corrélation du système nerveux et de l’activité psychique, sur la production et la diffusion de l’énergie nerveuse. Une excitation extraordinaire, anormale et morbide des nerfs, tel serait le principe physiologique de la passion. Quant à l’élément psychologique, il consisterait dans un consentement de l’âme, dans une défaillance de la raison.