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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, VIII.djvu/581

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guyau. — de l’origine des religions

nifestation d’une volonté beaucoup plus puissante que celle des hommes, conséquemment plus redoutable et plus digne de respect. Mais ici on va nous arrêter en nous faisant observer avec M. Spencer que les phénomènes les plus importants de la nature, entre autres le lever et le coucher du soleil, sont précisément ceux qui ont dû frapper le moins l’homme primitif ; il n’y voyait rien d’extraordinaire, puisque cela arrive tous les jours ; il n’éprouvait donc en face deux ni étonnement, ni admiration, m respect. Cet argument, fort ingénieux, nous semble aussi un peu sophistique ; si on le poussait jusqu’au bout, il reviendrait à soutenir qu’il n’y a rien dans la nature d’inattendu, rien qui rompe les associations d’idées préconçues, rien qui semble manifester l’intervention subite de volontés très puissantes. Or, tout au contraire, la nature est à notre égard pleine de surprises et de terreurs. La journée était belle ; tout d’un coup, les nuages s’assemblent, le tonnerre éclate. On sait le tremblement qui saisit les animaux au bruit du tonnerre ; dans les montagnes surtout, les roulements qui se répercutent leur causent une terreur indicible ; les troupeaux de bœufs sont affolés, se perdent souvent en se jetant tête baissée dans les précipices : c’est à grand’peine que la présence et les exhortations du bercer réussissent à maintenir le troupeau dans le calme ; probablement, les animaux voient en lui un ami puissant capable de les protéger contre cet être terrible que les Hindous appelaient le « hurleur ». Si les animaux tremblent ainsi devant la foudre, il est bien invraisemblable que l’homme n’y voie rien que de normal et d’ordinaire ; de même pour l’ouragan, qui semble une respiration immense, un souffle haletant. De même pour la tempête. On connaît le proverbe basque : « Si tu veux apprendre à prier va sur mer ; » c’est que tout homme qui se sent aux mains d’un ennemi tout puissant est porté à demander grâce. Qu’alors au moment même de la tempête ou de l’orage, le calme se produise tout à coup, que le soleil reparaisse comme une grande figure souriante, chassant les nuages avec ses « flèches d’or », victorieux en se montrant, ne semblera-t-il pas un auxiliaire bienfaisant ? ne l’accueillera-t-on pas avec des cris de joie et d’enthousiasme ? Sans cesse la nature nous montre ainsi des changements de décors imprévus, des coups de théâtre qui ne peuvent pas ne pas nous faire croire qu’un drame se joue, dont les astres et les éléments sont les vivants acteurs. Les éclipses de soleil, les simples phases de la lune sont bien faites pour étonner ceux mêmes que MM. Herbert Spencer et Max Müller déclarent incapables d’étonnement. Remarquons que la seule vue des astres, la nuit, provoque la plus vive admiration chez celui que le sommeil sous un abri n’y a pas habitué ; je me rappelle encore ma