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notices bibliographiques

si aucune idée d’expiation n’entrent dans l’application du châtiment ? Il est vrai que la plupart des criminels sont déterminés à l’être, de l’aveu de M. Garofalo. Resterait donc à savoir si le sentiment moral ne peut pas s’appliquer tout aussi bien à nous faire blâmer ou louer un acte déterminé[1]. Je crois qu’il en est ainsi, et que par conséquent ni le déterminisme, ni même la théorie utilitaire, entendue au sens large, ne doivent empêcher d’admettre dans la peine un élément moral. Si d’ailleurs nous ne voulons que suivre le principe de M. Garofalo, je me demande comment on pourra faire une distinction entre un criminel et un fou incurable et pourquoi on ne guillotinerait pas les fous dangereux dont la maladie est incurable. Ce serait là un procédé de sélection fort efficace au point de vue de la prévention spéciale ; mais qui proposerait de le mettre à exécution ? On se débarrasserait pourtant ainsi de bouches inutiles, et on pourrait employer à des travaux utiles les gens qui s’occupent d’eux. N’est-ce pas seulement le sentiment moral ou altruiste qui empêche d’agir aussi radicalement à leur égard, ou encore une théorie utilitaire qui sait tenir compte de la nature morale actuelle de l’homme.

Fr. Paulhan.

Le prime quistioni fisiologiche, prelezione del Dott. Luigi Luciani, professore ordinario di Fisiologia nella R. Università di Siena. — Enrico Detken, Napoli e Roma. 1880. 22 p. in-8o .

Dans cette leçon d’ouverture, M. L. Luciani tâche d’écarter de la physiologie toute métaphysique, spiritualiste ou matérialiste. Le matérialisme et le spiritualisme peuvent également se concilier avec les faits qui se résument dans la loi physiologique de la correspondance parfaite et absolue de l’activité cérébrale et de l’activité psychique. Mais ces deux systèmes sont en dehors de la science, parce qu’ils dépassent l’expérience. Peut-on au moins accepter l’un d’eux comme une hypothèse, et peut-on ainsi lui faire rendre quelque service à la science ? Non. Sans doute l’hypothèse est très souvent utile, même quand elle est fausse, mais c’est à la condition que l’expérience puisse intervenir pour en déterminer la valeur. Ni le spiritualisme ni le matérialisme ne sont vérifiables, car les phénomènes seuls nous sont accessibles, l’essence nous échappe. M. Luciani parait bien admettre une réalité substantielle. Ses idées d’ailleurs sont nettes et fort acceptables en général, mais elles ne seraient pas neuves pour les lecteurs de la Revue philosophique ; aussi n’insisterons-nous pas davantage.


  1. On peut dire aussi que tout le monde ne croit pas à la détermination nécessaire de la plupart des actes criminels, et que, au point de vue de la prévention générale, l’effet de la punition ne serait guère diminué.