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logique, sentiment, pensée ou action, à un autre phénomène qui est la conséquence logique du premier. »

Il explique cette tendance par une loi métaphysique universelle d’après laquelle toutes les forces s’exercent d’une manière logique. Puis, prenant les diverses formes de l’imagination ainsi définie, il tente de démontrer qu’elle est toujours, purement et simplement, la raison elle-même envisagée dans sa force de production : le génie et l’inspiration consistent uniquement dans la logique.

Dans sa seconde partie, l’auteur prétend confirmer ces vues en examinant l’imagination dans son activité même, en étudiant les procédés de l’artiste, du savant, de l’honnête homme lorsqu’ils inventent dans le domaine des arts et des sciences ou dans « la pratique de la vertu ».

Enfin la troisième partie étudie les œuvres produites par ces procédés : en analysant le vrai, le beau, le bien, M. Joyau arrive une fois de plus à constater que l’imagination et la raison sont deux pouvoirs identiques, car toutes nos œuvres ont partout les mêmes caractères, une extrême simplicité et une grande rigueur logique.

Nous ne nous arrêterons pas à ce que le plan de M. Joyau a de défectueux dans la forme : il est évident que la division de l’ouvrage en trois parties qui reviennent constamment sur le même sujet oblige l’auteur à des redites fatigantes, à une triple répétition, presque sans variantes, des mêmes démonstrations et des mêmes conclusions. Ce qui est plus grave, c’est le vice de la méthode même suivie par M. Joyau. En une pareille matière, où les faits sont si complexes et si touffus, la prudence conseillait de procéder comme dans les sciences d’observation proprement dites, de chercher par une vaste enquête à cataloguer et à classer tous les ordres de faits attribuables à l’imagination et à l’invention, et de tenter ensuite de découvrir la loi de ces faits et le mécanisme de leur production.

M. Joyau a préféré suivre une marche plus simple, qui nécessitait des recherches moins longues et moins pénibles, mais qui offrait de grands dangers. Il a, par hypothèse, posé une définition de l’imagination, et il a tenté de justifier ensuite cette hypothèse en montrant qu’elle rendait compte d’un certain nombre de faits pris comme exemples dans les sciences, les arts et la vie pratique. Sans doute cette méthode est celle qu’ont suivie tous les esprits supérieurs pour faire des découvertes de premier ordre dans tous les domaines scientifiques ; mais elle est, comme nous l’avons dit, très périlleuse. Il était à craindre, en effet, que, pour justifier sa définition préconçue de l’imagination, l’auteur ne fût amené a écarter précisément tous les cas qui auraient fait éclater l’insuffisance de sa formule à priori. On ne se résigne pas facilement à reconnaître les côtés faibles d’une hypothèse trop ingénieusement construite, et on aime mieux quelquefois se les dissimuler que de chercher une théorie plus compréhensive.

Par exemple, en ramenant l’imagination à la simple logique, M. Joyau