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matique a son siège dans la protubérance, le bulbe et la moelle, et probablement aussi dans les ganglions cérébraux (couches optiques et corps striés).

Il a été démontré par beaucoup de physiologistes (Setschenoff, Simonoff, Schiff, Herzen, Goltz, Lewisson, etc.) que les centres nerveux supérieurs exercent à l’état normal une sorte d’action modératrice sur les actions nerveuses automatiques. Les choses se passent comme si constamment, des centres supérieurs de l’encéphale, un influx nerveux modérateur allait vers les centres nerveux inférieurs (protubérance, bulbe et moelle) diminuer l’intensité des mouvements réflexes dont ils sont le siège. Un animal dont le cerveau est enlevé, a des actions réflexes bien plus énergiques qu’un animal intact.

Ces actions réflexes et automatiques suffisent à entretenir la vie dans des conditions très analogues aux conditions normales. Ainsi une grenouille, dont les lobes cérébraux sont détruits, saute, nage, se meut presque absolument comme une grenouille normale.

Il y a certainement chez les somnambules un état analogue. Chez eux la volonté n’existe plus, et l’action réflexe est exagérée. Je dis à V,.., « Asseyez-vous ! » et elle s’assoit ; « Marchez ! » et elle marche, jusqu’à ce que je lui dise de s’arrêter. Les pigeons de Flourens font de même. Si on les pousse en avant, ils marchent jusqu’au bout de la table, et tombent quand ils arrivent au bord, car ils continuent le mouvement commencé. Une fois qu’une impulsion est donnée, cette impulsion ne peut plus être arrêtée par la volonté ou la réflexion, et continue indéfiniment, jusqu’à ce qu’une excitation quelconque vienne s’opposer à l’impulsion primitive.

Quant à l’exagération de l’action réflexe, c’est aussi un phénomène constant, surtout si l’on considère l’excitabilité réflexe des muscles. Plus le sommeil est profond, plus l’excitabilité des muscles est grande ; elle devient telle qu’il suffit de toucher très légèrerement un muscle pour qu’il se contracture.

Ainsi ces deux phénomènes, excitabilité réflexe énorme et automatisme, concordent avec l’hypothèse que, dans le somnambulisme, les centres nerveux supérieurs, siège de la volonté et de la spontanéité, n’exercent plus leur action normale.

Cependant tout n’est pas dit quand on a prononcé le mot d’automatisme ; car on ne peut établir d’identité entre l’état d’un animal privé de cerveau, plongé par conséquent dans un sommeil sans rêves, et l’état du somnambule, dont la mémoire est parfaite, dont l’intelligence est très vive, et dont l’imagination surexcitée construit les hallucinations les plus complexes.