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l’auteur cherche quelle est la valeur de la certitude morale et justifie les conclusions annoncées au début.

On n’attend pas de nous que dans ce compte rendu nous nous attachions à la partie historique et polémique de ce livre. Faire un résumé de résumés serait une tâche ingrate, et, qui plus est, inutile. Nous nous préoccuperons surtout de dégager aussi nettement qu’il se pourra la théorie propre à M. Ollé-Laprune ; il faudra ensuite l’apprécier. Ce livre n’est pas un de ceux dont on peut rendre compte sans les discuter, et il sera nécessaire de déroger, pour une fois, à la règle si sage adoptée par la Revue, qui est de donner toujours plus de place à l’exposition qu’à la critique. C’est que le livre de M. Ollé-Laprune n’est pas un livre comme un autre : il présente peu d’analogie avec les ouvrages dont nous nous occupons ici d’ordinaire ; il est d’une autre allure et d’un autre ordre. C’est un livre de discussion, et, on peut le dire sans offenser l’auteur, de passion. Assurément il veut convaincre ; l’effort de la pensée pour donner à la doctrine toute sa force et sa précision, pour multiplier les preuves, pour prévoir les difficultés, pour mettre à néant toutes les objections, y est considérable ; c’est l’œuvre d’un philosophe, d’un esprit net et vigoureux. Mais ce n’est pas lui faire tort que de dire qu’il veut aussi persuader. Suivant le mot de Platon qu’il a pris pour épigraphe, M. Ollé-Laprune a mis dans son œuvre « son âme tout entière » ; on y voit éclater à chaque ligne l’ardeur dont il est animé, la chaleur de ses convictions, l’enthousiasme généreux dont il est comme emporté. Ajoutons qu’elle est écrite avec un incomparable talent de style, toujours vivante, d’une éloquence pressante et passionnée, sans que jamais pourtant tout ce mouvement nuise à la clarté, à l’exquise distinction, à la pureté classique de la forme. Le sort naturel d’un pareil livre, c’est de provoquer, avec une véritable sympathie pour l’auteur qui se livre tout entier et combat d’un si grand cœur, une vive réaction de la part de ceux qui n’en partagent pas la doctrine. Il est difficile de se contenir, quand on est si vivement pressé, et de réprimer l’objection qui s’offre à l’esprit surexcité par l’attaque : la riposte part pour ainsi dire d’elle-même en présence d’une doctrine qui s’expose avec une si fière assurance. Et pourquoi se contiendrait-on ? À en juger par plusieurs passages de son livre, M. Ollé-Laprune fait peu de cas de « la lumière sans chaleur », de la lumière « sèche », qui brille seule dans la sphère des pures idées. Ce qu’il doit donc le plus souhaiter, à défaut d’une adhésion que nous ne pouvons lui donner, c’est de remuer les esprits, de les faire penser, de les provoquer à la discussion. Aussi croyons-nous que nos critiques, pour vives qu’elles soient, lui plairont mieux que le dédain d’une indifférente et froide analyse. La plus cruelle critique qu’on pût faire d’un tel livre, quand on n’en admet pas les vues, serait de ne pas lui adresser de critiques.

La théorie de la certitude, suivant M. Ollé-Laprune, est fort simple. Une chose se présente en faisant impression sur vous : voilà la per-