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g. compayré. — la folie chez l’enfant

cas, chez l’éléphant devenu destructeur comme chez l’enfant en proie aux convulsions, le principe de désordre est le même : une cause morbide a supprimé le lien naturel qui subordonne les mouvements de l’individu aux besoins normaux de ses organes ou aux impressions reçues du dehors ; une cause morbide a déchaîné l’activité musculaire et livré à une sorte de fureur épileptique tous les éléments moteurs de l’organisme.

Si l’on considère chez l’enfant la nature des causes qui déterminent les convulsions, on sera encore plus disposé à admettre le caractère mental de ce fait pathologique. Sans doute l’accès convulsif provient souvent d’un accident. Trousseau en cite un exemple curieux. Un médecin appelé auprès d’un petit enfant s’avise d’ôter le bonnet du malade : il aperçoit un brin de fil posé sur le crâne, et, cherchant à l’enlever, il attire à lui une longue aiguille profondément enfoncée dans le cerveau. L’aiguille une fois arrachée, les convulsions cessèrent immédiatement[1]. Mais le plus souvent les convulsions relèvent de causes intimes, d’affections cérébrales transmises par l’hérédité. Elles se produisent chez des individus doués d’une susceptibité nerveuse particulière, qui passe, avec la vie, des ascendants aux descendants, et qui se manifeste tantôt par un phénomène, tantôt par un autre, par un accès convulsif chez l’enfant, par l’épilepsie ou l’hystérie chez l’adulte. « Que l’on veuille bien y regarder avec soin, et l’on ne trouvera peut-être pas une seule famille d’aliénés dans laquelle l’éclampsie de l’enfance n’ait joué un certain rôle. Même dans les familles simplement nerveuses, ne renfermant pas encore d’aliénés dans leur sein, l’apparition de l’éclampsie de l’enfance se maniant successivement chez plusieurs enfants doit être considérée comme un symptôme de mauvais augure [2]. » Elle est comme le premier signal de l’invasion possible de la folie dans une famille jusque-là saine.

Les convulsions peuvent donc être considérées comme le premier degré de la folie chez l’enfant : l’hallucination est le second.

Le nouveau-né ne tarde pas à devenir autre chose qu’un petit être qui se meut : il se manifeste bien vite comme an être sensible, capable de perceptions et de sensations. Il voit, il entend, il touche. L’intelligence s’ouvre à la représentation du monde extérieur. Chaque jour, un morceau de la réalité matérielle se détache, sous forme de perceptions, de l’ensemble des choses, et pénètre dans le cerveau

  1. Trousseau, op. cit., p. 166.
  2. Voyez Annales psychologiques, 1879, I, p. 55, De l’alcoolisme des parents considéré comme cause, d’épilepsie chez leurs descendants, par le Dr H. Martin.