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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XV.djvu/217

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ANALYSES.bergmann. Problèmes fondamentaux, etc.

1o Le principe matériel de l’identité, plaçant la vérité d’une détermination dans l’identité matérielle de la substance.

2o Le principe matériel de contradiction, établissant dans toute position (Setzung) soit identité, soit contradiction matérielle ;

3o Le principe matériel du troisième exclus, établissant que toute détermination est en opposition avec une chose aussi longtemps qu’elle est opposée à une autre détermination nécessaire à l’identité de cette chose (ibid., § 57, 58).

Mais au-dessus de ces principes s’élève une question, celle de la possibilité même de la connaissance, laquelle se ramène à la possibilité de la perception. — N’y a-t-il pas un obstacle insurmontable à ce que la pensée s’unisse à l’être ? Comment un contenu de la conscience, subjectif et dépendant de l’esprit, peut-il être en même temps une chose objective, libre en face de la conscience et existant indépendamment d’elle ? Comment, en un mot, le perçu peut-il être ? où se fait cet accord du subjectif et de l’objectif ?

À côté du scepticisme qui nie que la conscience puisse sortir d’elle-même, le criticisme s’est élevé, avec sa science du phénomène et de l’apparence. — Mais toute connaissance véritable est connaissance de l’être (Platon), l’apparence est ce qui n’est pas, et il n’y a point de connaissance de ce qui n’est pas (part.  II, ii, § 60, 61).

La possibilité de la perception ressort de la notion de l’être ; l’être est selon sa notion l’être perçu : esse est percipi. — La perception est une activité de l’esprit qui donne l’être aux déterminations et aux substances ; ce n’est point une réceptivité passive. — Il n’y a point de perception sans être ni d’être sans perception dont il est l’objet : ce sont des notions absolument corrélatives’on ne peut penser l’une sans penser l’autre (ibid., § 62). Ainsi tous les rapports des êtres, ceux de causalité, de substance, de nécessité, d’identité, sont des rapports logiques, sans objet, si la pensée ne les pense.

Mais il est un écueil à éviter : ne laisser subsister que ce seul côté, que l’être est subjectif, serait supprimer la possibilité de perceptions (Wahrnehmungen) fausses ; ne laisser subsister que l’autre côté, que l’être ne fait qu’un avec l’objectif, serait supprimer la possibilité de perceptions vraies et objectives ; le résultat est le même : c’est le scepticisme (Gorgias et Protagoras) [ibid., § 63].

Nous éviterons cet écueil par les considérations suivantes : il est absolument impossible qu’un être réel soit perçu par un autre : une chose réelle, étant perçue, ne peut l’être absolument que par elle-même ; elle est à la fois sujet et objet de la perception ; son être se scinde en percevoir et être perçu. — Ainsi la véritable notion de l’être est celle de l’être qui se perçoit lui-même : c’est le seul refuge contre le scepticisme, la condition de possibilité de toute perception, de toute connaissance (ibid., § 64, 65).

Y a-t-il derrière l’activité de la perception de soi un substrat, un noyau persistant au milieu de l’infinité des perceptions particulières,