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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XV.djvu/493

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bénard. — la vie esthétique

répudier le riche trésor du passé, légué par le xviiie siècle en particulier, en second lieu d’être trop systématique. Il est fâcheux qu’à Hegel on ait ajouté seulement Kant, Schiller, Schleiermacher, Herbart, etc. Les esthéticiens récents ont toujours travaillé d’après un point de vue spéculatif. Il fallait étendre le cercle, rejeter, en outre, toute terminologie obscure qui sent la doctrine de l’école, se garantir de l’abus des abstractions logiques. Les successeurs de Hegel ont cherché à remédier à ces défauts ; mais le cercle de la vie esthétique y est toujours resté trop étroit. La méthode qui a présidé à ces travaux est encore celle de la construction logique plutôt que celle-de l’observation et de l’analyse. Le but que l’auteur se propose est de « concevoir la vie de l’imagination comme une branche spéciale de la vie de l’esprit (als eigenen Zweig des Geistesleben) et de partir de là pour déduire d’une façon vivante, non par voie d’abstraction logique tout le domaine de la vie esthétique, d’arriver par là à une réelle explication de l’essence de la beauté. » — « Cette méthode lui permettra d’exposer dans toute leur richesse la multiplicité des formes concrètes que présente à nos yeux le spectacle si varié de la nature et de l’art. » (Préface.)

Le caractère de cette méthode, on le voit, c’est d’être empirique, mais non d’une façon étroite, exclusive. Elle est en même temps éclectique, non dans le sens vulgaire d’une combinaison factice ou artificielle, mais d’une synthèse véritable et organique. Du moins, c’est ce à quoi vise l’auteur. La base sur laquelle il appuie son œuvre, dit-il, est psychologique et anthropologique. Sur cette base, il essayera de réunir et de concilier les deux tendances opposées du réalisme et de l’idéalisme, d’en rapprocher et combiner les résultats. Son point de départ est subjectif, et il a raison de déclarer qu’il suit la voie qui lui a été ouverte par Kant, Schiller et les esthéticiens qui avant lui l’ont parcourue.

Avant d’examiner les points principaux de cette esthétique, nous devons indiquer le plan général et les divisions principales.

L’ouvrage est divisé en deux parties, l’une générale ou abstraite, l’autre spéciale ou concrète. — La première embrasse le domaine entier de la vie esthétique en général. Elle doit faire connaître : 1o l’essence de la vie esthétique et sa place dans l’ensemble de la vie spirituelle. 2o Vient ensuite tout ce qui concerne l’objet esthétique, c’est-à-dire le monde de l’imagination dans la multiplicité de ses formes. 3o Enfin la vie esthétique y est considérée dans son existence et son développement dans l’individu. — La seconde partie est toute consacrée à l’analyse et à la description des formes concrètes du beau dans la nature ou le monde réel, tant physique que moral, ainsi qu’à une