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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XV.djvu/682

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tions factices. Celui qui sacrifie le plaisir immédiat à un plaisir futur, plus conforme au but, est libre. Les natures ardentes, chez qui l’intensité des tendances conduit tout de suite à l’action, ont moins de liberté que ceux qui sont capables de réflexion. La plupart des cas de volonté non libre sont donc caractérisés par la victoire des tendances sensorielles sur les tendances idéales (pp. 81-83) ou des représentations mal appropriées sur les représentations appropriées.

Ni sous la forme instinctive, ni sous la forme consciente, la volonté ne peut être imaginée sans le sentiment (Gefühl). Le sentiment, au sens le plus général, c’est-à-dire le sentir, est la base de toute vie psychique. Les opinions sur sa nature sont fort diverses. La conformité au but est le caractère qui nous importe le plus, au point de vue de phénomènes de la volonté. Tous les sentiments d’une manière ou de l’autre servent à la conservation de l’espèce et ont par conséquent une finalité. Le sentiment est-il une propriété de la matière en général et faut-il, avec certains auteurs, l’attribuer à chaque atome ? M. Schneider s’interdit toute affirmation à ce sujet. Nous n’avons de preuves de son existence que chez les animaux ; tenons-nous-en là. Quant à savoir comment une combinaison chimique peut sentir, c’est un problème aussi impénétrable que celui de l’essence de la matière, de la gravitation, de l’affinité chimique, etc. Il ne peut donc être question ici des causes dernières de la sensibilité ; mais simplement des conditions dans lesquelles elle se produit. « La sensibilité a sa cause dans l’organisation, c’est-à-dire dans le sang, et, d’une manière plus générale, dans les processus vitaux de l’animal » (p. 129), et les diverses manières de sentir ont pour condition des organisations corporelles différentes. Le problème de l’origine de la sensibilité se réduit donc à celui de l’origine de la vie animale. De même que parmi les combinaisons chimiques infiniment diverses qui se sont produites sur la surface de la terre, il s’en est trouvé qui renformaient les conditions d’existence d’une substance vivante capable de reproduire d’autres substances vivantes ; de même en un mot que la vie n’est qu’un cas spécial parmi une infinité de cas, de même la propriété de sentir n’est qu’un cas parmi des cas innombrables : et il n’est pas plus difficile de concevoir des combinaisons sentantes issues de combinaisons non sentantes que des êtres vivants d’êtres non vivants.

L’auteur passe ensuite à la classification des impulsions (Triebe). Nous avons vu plus haut qu’il les ramène à quatre grandes manifestations. Chacune de ces quatre grandes catégories est divisée par lui régulièrement en trois groupes suivant que les impulsions ou tendances viennent des sensations, des perceptions ou des images et idées (Empfindungstriebe, Wahrnehmungstriebe, Vorstellungs-und Gedankenstriebe). Il présente ainsi dans son ensemble le tableau de la vie animale auquel est consacré le reste du livre.

Nous ne pouvons le suivre dans ce détail. Donnons seulement comme exemple de sa manière de procéder la classification des tendances de