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SOCIÉTÉ DE PSYCHOLOGIE PHYSIOLOGIQUE


SUR LA PAROLE INTÉRIEURE[1]

Je crois inutile de rappeler les récents travaux qui ont été publiés sur la parole intérieure, et je n’ai pas l’intention de prendre part aux débats qui se poursuivent encore sur cette question. Mais je voudrais attirer l’attention sur un point, capital à mes yeux, de la théorie de M. Stricker ; je voudrais montrer quelles conséquences on peut en déduire pour ce qui concerne le mécanisme de l’intelligence.

Tout acte de l’intelligence consciente serait, d’après M. Stricker, accompagné d’une parole intérieure ; et cela serait vrai aussi bien lorsque l’intelligence est passive, lorsque nous lisons ou lorsque nous écoutons, que lorsqu’au contraire l’intelligence est active, c’est-à-dire quand nous parlons, quand nous écrivons, ou lorsqu’enfin nous pensons discursivement.

C’est ce point que je considérerai comme démontré, sans distinguer d’ailleurs les cas où cette parole intérieure se réduit à de simples mouvements musculaires (images motrices) ou ceux où elle se trouve unie à des images auditives et visuelles. À cet égard, les différents tempéraments présentent sans doute des différences notables ; je me contenterai de dire que, pour ce qui me concerne, les images visuelles sont négligeables ; les images motrices m’apparaissent au contraire très nettement dans diverses circonstances, mais elles sont aussi très souvent accompagnées d’images auditives, produites par une véritable articulation à voix basse.

Il est inutile d’ajouter que la parole intérieure échappe, la plupart du temps, à la conscience ; mais, comme on peut en constater l’existence toutes les fois que l’on s’observe soi-même au moment d’un acte intellectuel, on ne doit pas douter qu’elle n’existe également, alors même que l’on ne s’observe pas.

Elle accompagne, ai-je dit, tout acte de l’intelligence consciente ; j’aurais dû dire : elle précède, si elle est, en effet, une condition essentielle du lait intellectuel. Mais si elle le précède, elle peut en être détachée, c’est-à-dire qu’il sera possible que, dans certains cas, elle existe

  1. Séance du 25 octobre : Présidence de M. Ribot, vice-président.