vements, mais elle n’est ni une idée ni un mouvement. Pour que l’habitude agisse sur les idées, pour qu’elle les associe et qu’elle aide à les rappeler, il faut qu’il y ait des idées qui viennent d’ailleurs et qui existent antérieurement à l’habitude. L’habitude changée en idée serait la plus merveilleuse des métamorphoses.
La mémoire est, dit-on, une espèce d’habitude. Quelle est donc cette espèce ? Est-ce une habitude générale de l’esprit ou une habitude particulière relative à chaque idée rappelée ? Ne s’agit-il que d’une habitude générale de l’esprit qui facilite et augmente la faculté de penser ? C’est ne rien dire en vérité de bien nouveau, rien même qui, à vrai dire, touche à la question qu’on prétend résoudre. Comment cette disposition générale pourrait-elle rendre compte de la réviviscence de telle idée plutôt que de telle autre ? Sans doute il s’agit d’habitudes particulières correspondant à chacune des idées passées susceptibles d’être rappelées à la mémoire, et non d’une habitude générale. Qu’il y ait de telles habitudes que l’esprit contracte à la suite de chaque idée ; que ces habitudes puissent faciliter le rappel de ces mêmes idées, d’autant plus que la répétition les a rendues plus fortes et plus profondes, nous ne le contestons en aucune façon ; mais nous sommes toujours en présence de la même difficulté, et rien n’est expliqué si l’on n’y ajoute la persistance des idées à l’état latent. Comment, en effet, redisons-le, cette habitude ou trace deviendra-t-elle consciente et se changera-t-elle en une idée ?
M. Rabier, dans ses savantes analyses de la mémoire, semble d’abord se ranger à l’opinion de ceux qui prétendent la ramener à l’habitude. Mais, après avoir examiné cette solution dans tous les sens avec sa pénétration ordinaire, il se voit obligé d’en reconnaître l’insuffisance, et il se trouve réduit à conclure : « qu’il y a une raison permanente inconnue où se fonde la mémoire et qu’on appelle, si l’on veut, l’habitude ». Parler ainsi n’est pas beaucoup se compromettre, et revient tout simplement à un aveu d’ignorance quelque peu déguisé sous une forme scientifique. Il n’est donc pas étonnant que l’auteur cherche ailleurs une autre solution plus propre, il l’espère, à satisfaire ses lecteurs et à le satisfaire lui-même. Mais où va-t-il la chercher et où prétend-il la trouver ?
Il nous surprend tout d’un coup par l’abandon de la méthode psychologique, c’est-à-dire de l’étude par l’esprit des faits de l’esprit, qu’il avait jusqu’alors fidèlement suivie, pour la méthode physiologique et pour des hypothèses sur le cerveau, celles-là vraiment invérifiables, à la différence des idées latentes. Laissant donc de côté la psychologie où désormais il désespère de trouver la solution du