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ANALYSES. — g. le bon. Civilisations de l’Inde

en définitive, avec la religion au sens positif du mot, les livres traduits qui ne contiennent que des théories philosophiques bien postérieures en date à l’époque de la fondation du bouddhisme. « Ce n’est pas avec de froides spéculations philosophiques qu’on fonde une religion comptant 500 millions de sectateurs. C’est comme si dans deux mille ans, on donnait les Premiers Principes de Herbert Spencer ou l’Origine des espèces de Darwin, comme l’exposé des doctrines que professaient les peuples chrétiens au xixe siècle » (p. 362). Nous croyons qu’ici M. G. Le Bon force un peu la note et qu’il eût suffi de dire : C’est confondre le catholicisme tel qu’il est cru, accepté, pratiqué par la masse des dévots ignorants avec celui qui se trouve dans les écrits de Bossuet.

L’exposition de cette thèse nous a entraîné un peu loin. Il resterait à parler des chapitres consacrés à la constitution mentale de l’Hindou et à cette tournure d’esprit, spéciale de la race que l’auteur appelle ingénieusement « une psychologie déformante » ; mais il en a donné la substance ici même (décembre 1886).

Le dernier livre tout entier traite des croyances, institutions, mœurs et coutumes étudiées dans leur évolution. M. Gustave Le Bon a utilisé pour cette étude la collection des apologues, proverbes et contes populaires dont il a groupé des extraits sous les titres suivants : la destinée, le caractère, la vie, la vieillesse et la mort, mobiles des actions humaines, le savoir et l’ignorance, la pauvreté et la richesse, la conduite dans les diverses circonstances de la vie morale, la politique. Il est remarquable que l’esprit hindou, si vague et si flottant dans la haute poésie et la métaphysique, devient ici clair, précis, pratique.

L’exécution typographique de ce nouveau livre égale au moins celle du précédent : de nombreuses gravures d’après des aquarelles ou photographies de l’auteur ou extraites de ses collections sur l’Inde, font un grand honneur à la maison qui a publié ce bel ouvrage.

Th. Ribot.

H. Maudsley. — Natural causes and supernatural seemings. 1 vol.  in-8o, 368 p.. London, Kegan Paul, Trewch and Co, 1886.

Comment se fait-il que l’humanité, à ses différents âges, et dans des pays différents, depuis son origine jusqu’à aujourd’hui, ait eu un si grand nombre de notions différentes du surnaturel, s’il y a un surnaturel avec lequel l’intelligence et la sensibilité peuvent être en relation ? Comment se fait-il que les hommes aient pu avoir une notion quelconque du surnaturel s’il n’y a point de surnaturel accessible ? Le livre de M. Maudsley est une réponse à cette double question. L’éminent psychologue anglais voit dans la croyance au surnaturel un produit anormal dont la cause peut se trouver soit dans des opérations mal conduites d’un esprit sain, soit dans les illusions d’un esprit malade. Il en étudie tour à tour les différentes origines.