Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XXIII.djvu/428

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
418
revue philosophique

subjectives sont d’une part la très grande prépondérance des hallucinations visuelles sur les hallucinations auditives, et la prépondérance plus décidée encore des cas où les personnes ou les voix ont été reconnues sur ceux où elles ne l’ont pas été. MM. Gurney et Myers se sont livrés à une enquête pour déterminer combien de personnes ont éprouvé des hallucinations qui n’ont coïncidé avec aucun événement extérieur : elle a porté sur un groupe de 5,680 personnes ; le résultat est le suivant : dans les douze dernières années, un adulte sur 90 a éprouvé une hallucination auditive, 1 sur 247 une hallucination visuelle. Rapprochés des chiffres que leur a fournis leur étude des hallucinations télépathiques, ces résultats rendent peu vraisemblable que les coïncidences soient dues au hasard seul. Ce que nous pouvons nous demander, c’est quelle est la valeur de cette enquête quelle confiance il faut avoir dans les réponses qui ont été faites aux questions que l’on a posées. Là encore les chances d’erreur sont si nombreuses que nous ne croyons pas que cette statistique puisse réellement servir de base pour un calcul des probabilités. MM. Gurney et Myers étudient à part deux catégories de phénomènes tout particulièrement intéressantes : ce sont d’abord les cas où l’action est réciproque, où deux personnes apparaissent l’une à l’autre, mais ils sont extrêmement rares, paraît-il : ce sont ensuite ceux où une même hallucination affecte à la fois plusieurs personnes : ils en citent 48 dans le corps de l’ouvrage. Deux hypothèses se présentent pour les expliquer, d’après M. Gurney : il faut admettre ou bien que l’agent a agi à la fois sur l’esprit de plusieurs personnes ou bien qu’il n’a agi que sur une seule personne qui à son tour a réagi sur les autres. La première hypothèse offre de grandes difficultés, lui semble-t-il : les formes des hallucinations télépathiques sont très variées, et ces hallucinations peuvent être séparées de l’événement avec lequel elles coïncident par un espace de temps assez variable : il est étrange qu’elles apparaissent au même moment sous la même forme chez plusieurs personnes. Il faut ajouter qu’il est fort rare que ces hallucinations collectives soient éprouvées par des personnes séparées et que, même dans ce cas, elles sont d’ordinaire voisines l’une de l’autre. M. Myers, dans une note assez longue[1], propose une autre interprétation des phénomènes : il pense qu’à côté de la télépathie, il y a place pour la clairvoyance, pour la perception à distance. Nous n’avons pas ici à discuter cette opinion, nous ne faisons que l’indiquer.

V

Les livres dont nous venons de parler méritent d’être lus par tous ceux qui s’intéressent à la psychologie. M. Ochorowicz nous a donné un tableau complet de tout ce qui a été fait sur la suggestion mentale,

  1. Note on a suggested mode of Psychical interaction, II, pp. 277-316.