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PIERRE JANET.l’anesthésie systématisée

l’odorat et le goût restent normaux, seule la sensibilité tactile est complètement absente, les souvenirs sont précis et complets, sauf pour tout ce qui a rapport aux sommeils hypnotiques et aux crises d’hystérie. Ce sont là en effet des lacunes dans sa mémoire qui quelquefois la préoccupent beaucoup. La volonté semble assez forte, et le caractère est vif et colère. Adrienne à ce moment existe à peine. Peut-être a-t-elle la sensibilité tactile et en fait-elle l’éducation, mais elle ne se manifeste pas. 2o L’état de somno-vigil qui se manifeste souvent dès qu’elle me voit, ou, s’il le faut, à la suite d’un sommeil hypnotique. — L… est alors comme gênée et amoindrie, elle n’a pas précisément peur de moi, dit-elle, mais elle est très intimidée. L’ouïe a beaucoup diminué, et certaines paroles, quand c’est moi qui les prononce en les faisant précéder du nom d’Adrienne, ne sont pas du tout entendues. « Je vois vos lèvres remuer, dit-elle, mais je n’entends pas du tout ce que vous dites. » Elle n’entend si je lui parle à elle, la vue et l’odorat ne subissent pas de modifications s’il n’y a pas de suggestion spéciale, le tact manque toujours entièrement. Les souvenirs, sauf ceux que j’ai indiqués, persistent, et le souvenir des paroles qu’elle prononce dans cet état se conserve. La volonté spontanée existe, mais très altérée, le caractère est devenu beaucoup plus doux. Adrienne alors existe davantage, elle m’entend quand je m’adresse directement à elle, elle a la sensibilité tactile complète, elle a les souvenirs des somnambulismes et des crises d’hystérie, elle n’a le souvenir du reste de l’existence que si on insiste, et alors il est perdu pour L… à ce moment. Elle n’a aucune volonté spontanée, mais peut agir sur mon commandement à l’insu de L… lorsque cette dernière est fortement distraite par une autre personne. Si l’attention de L… est concentrée sur mes commandements ou si elle agit elle-même, mes ordres à Adrienne ne sont pas exécutés. 3o Le sommeil hypnotique ordinaire que je produis par suggestion. — L. parle encore, voit et entend, mais n’a plus de spontanéité, elle reste immobile sur sa chaise sans bouger d’elle-même. Adrienne est plus forte, et il n’est plus nécessaire de distraire L… pour lui faire exécuter des ordres. 4o En passant des intermédiaires possible, un somnambulisme complet que je viens de décrire. — L… n’existe plus du tout. Adrienne a pris la parole et parait pendant quelque temps une personne plus complète et plus libre que L… n’est jamais, même à l’état de veille. Aucune suggestion n’est plus possible. 5o Un état que j’ai fréquemment observé autrefois et que j’ai à peine pu produire une fois et incomplètement à présent[1], la catalepsie. —

  1. Il est assez intéressant de remarquer qu’autrefois, au moment des grandes crises d’hystéro-épilepsie, j’ai pu provoquer facilement la catalepsie véritable et la