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qui a quelque importance au point de vue médico-légal, a réussi de tous points.

Doit-on en conclure que chez cette malade tous les effets hypnotiques qu’on produit maintenant sont les résultats de sa mémoire ? Puisqu’elle connaît les signes physiques des paralysies motrices, en résulte-t-il que ces signes physiques sont produits maintenant par auto-suggestion ? Est-ce aussi l’auto-suggestion qui explique ses contractures somnambuliques, ses sensations consécutives à la suite des hallucinations colorées, etc., etc. ? Sur ce point, on ne peut rien dire de catégorique ; il me paraît probable, cependant, que bien que le sujet connaisse ces phénomènes, ce n’est pas une raison pour qu’ils aient toujours et exclusivement une source psychique. Nous savons tous qu’un choc sur le tendon rotulien produit le réflexe du genou ; est-ce une raison d’admettre que ce réflexe est produit uniquement par l’imagination ?

Mais ce qui est certain, c’est que la première fois que l’expérience a été faite, la malade ne pouvait pas en connaître le résultat, et, par conséquent, le phénomène d’auto-suggestion n’a pu, dans certains cas, jouer aucun rôle. J’ignore comment ont été faites les premières expériences de paralysie par suggestion ; mais je sais comment a été faite la première expérience d’image consécutive par hallucination colorée, car c’est moi qui l’ai imaginée et qui l’ai exécutée avec le concours de M. Richer, il y a bientôt trois ans. La malade, W…, en ignorait donc le résultat. On peut donc, soit en opérant sur un sujet neuf, soit en faisant des expériences neuves d’une certaine nature, écarter l’auto-suggestion.

Nous dirons un mot aussi de la simulation, danger qui, sans être absolument imaginaire, a été beaucoup exagéré. Dans chaque expérience, l’observateur doit prendre des précautions spéciales pour n’être pas trompé. Nous nous sommes préoccupés de trouver un moyen général pouvant s’appliquer à toutes les expériences. Le suivant, que nous avons mis plusieurs fois à l’épreuve, mérite d’être recommandé.

Il faut partir de ce fait que la suggestibilité du sujet peut être démontrée par des expériences précises, par exemple celles des hallucinations ; on peut donc employer cette suggestibilité comme un moyen de déjouer la simulation. Nous suggérons à G… en somnambulisme que toutes les fois qu’elle dira un mensonge ou se livrera à quelque exagération, elle ne pourra pas s’empêcher de s’écrier : Sapristi ! Cette exclamation partira avec la fatalité d’un réflexe, et elle n’entendra aucun son, elle ne s’apercevra de rien. Nous créons ainsi un appareil avertisseur, destiné à nous donner un signal d’alarme