LE PHÉNOMÉNISME ET LE PROBABILISME DANS L’ÉCOLE PLATONICIENNE
CARNÉADE
II
Il s’agit maintenant d’examiner la partie affirmative de la doctrine de Carnéade.
Les Stoïciens objectaient à Carnéade, comme autrefois à Arcésilas, qu’en supprimant l’assentiment, on supprime du même coup les arts, les métiers, toutes les occupations de la vie humaine. L’homme qui affirme qu’on ne peut rien percevoir, disaient-ils, est condamné à une inaction complète[2].
Carnéade répondait, d’abord, selon Clitomaque[3], que les Académiciens ne nous enlèvent nullement nos sens (ait vehementer errare eos qui dicant ab Academia sensus eripi); ils n’ont jamais dit, en effet, qu’il n’y a ni son, ni couleur, ni saveur, mais seulement qu’on ne trouve dans aucune de ces sensations, pas plus qu’ailleurs, la marque de la vérité et de la certitude (veri et certi notam).
- ↑ Voir le numéro précédent de la Revue philosophique.
- ↑ Plut. Moralia, 1057, A. Ὁ πλεῖστος αὐτῶ τῳ Χρυσίππῳ καὶ Ἀντιμπάτρῳ πόνο γέγονε περὶ τού μήτε ὁρμᾷν ἀσυγκαταθέτος.
Sextus, Adv. Math., VII, 166. Ἀπαιτούμενος δέ καὶ αὑτός (ὁ Καρνεαδης) τι κριτὴριον πρὸς τε τὴν τοῦ βίου διεξαγωγὴν καὶ πρὸς τὴν τῆς εὐδαιμονίας περίκτησιν δυνάμει ἀπαναγκαζέται. Les mots ἀπαιτούμενος et ἀπαναγκαζέται indiquent évidemment une objection des Stoïciens à laquelle Carnéade fut obligé de répondre.
Cic., Acad. pr., II. 11. (Lucullus d’après Antiochus). Qui… assensum tollit, is omnem actionem tollit e vità… II, 19. Sublata assensione, omnem et motum animorum et actionem rerum sustulerunt. II, 47, 144. (Cic. d’après Philon.) « …Quum artificia tolli quereris a nobis. » — Cf. II, 33, 108. — Cf. Stobée, Floril. IV, 236, n° 21, 24.
- ↑ Cic., Acad. pr., II. Cicéron traduit Clitomaque presque mot pour mot : « Scripsit igitur his fere verbis — sunt enim mihi nota propterea quod earum rerum ipsarum de quibus agimus, prima institutio, et quasi disciplina illo libro continetur. »
