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ANALYSES.a. russo. Essais sur un nouveau code, etc.

lui, il se borne à le montrer comme un idéal réalisable et désirable. « Cette idée sera-t-elle bien accueillie ? dit l’auteur, tout à la fois confiant et modeste. J’en doute : mais dans la négative, je me réconforte par la pensée que la publication d’un livre inutile est un des plus petits maux qui puissent arriver en ce monde. » Cette franche bonhomie, chrétienne ou philosophique, suffirait pour désarmer l’acerbe critique.

Citons, comme nous l’avons promis à nos lecteurs, les passages nombreux et compacts où ils pourront trouver ou reprendre leur bien. Voici d’abord, page 100-p. 171, une revue des philosophes de tous les temps, à propos de la vie au sens physiologique ; tout à côté, une classification des sciences ; ensuite, de pp. 180-293, les opinions des socialistes, et celles de quelques sociologistes les moins récents sur la vie sociale (Filangieri, Cantù, Tomasio, Garelli, L. Blanc, Smith, Coblet, Ricardo, Comte, Littré, etc.) ; enfin pp. 667-869, la méthodologie du droit, étudiée amplement dans Comte, Darwin, Spencer.

M. Russo critique fort la loi des trois états. D’abord, il n’a pas de peine à trouver qu’elle n’est pas une nouveauté, ce qui n’est pas prouver grand’chose. Ce qui est plus sérieux, c’est qu’elle n’est pas vraie, que la prétendue connexion entre l’histoire et la physique, entre le monde physique et le monde moral, n’existe pas. De plus, et l’argument porte coup, l’auteur nie qu’elle soit prouvée par l’histoire. Un dernier argument, qui se rapproche de celui-ci, c’est qu’elle n’est pas une harmonie du principe à la fin : la religion, qui est à la première période de l’humanité, ne devrait pas se trouver à la dernière ; or, de l’aveu de Comte, elle s’y trouve, pour recommencer le cycle.

L’auteur dit non moins catégoriquement son fait à Darwin. Sa manière de concevoir la genèse des espèces n’est pas du tout nouvelle dans la science. (Qu’importe, si Darwin la confirme ?) Darwin répudie la métaphysique, et il y retombe en recueillant des ressemblances. Il fausse et vicie la méthode, car il commence par la nature, et non par l’origine et par la fin. La paléontologie, qu’on cite pour le triomphe du transformisme, en détruit l’impie système. (Neuf preuves à l’appui.) Le darwinisme renverse la morale et le droit ; c’est une dégradation scientifique, morale, esthétique. L’abbé Russo est sévère.

Nos lecteurs supposent bien que, si Darwin est si rigoureusement traité, Spencer doit donner encore plus de prise aux objections du catholique auteur de l’essai. Pour bien éclairer leur religion, ils n’ont qu’à lire de la page 783-830.

Bernard Perez.