la connaissance ou le sentiment, et l’organisme, mais comme la cause même de la conscience et de la vie, tout fait psychologique, donc toute connaissance, toute perception, est un acte volontaire. Si d’ailleurs on pense que la volonté, ne diffère pas, en nature, de la sensibilité, on arrivera cette conclusion, que les faits psychiques des diverses classes sont des transformations d’un seul élément primitif, ce qui permet à la perception d’être, non pas seulement une espèce de la connaissance, mais de confondre en soi la connaissance, le sentiment et la volonté.
Cette pénétration réciproque de toutes les fonctions mentales vient-elle de ce que l’âme ou l’esprit, ou le moi, est une unité sui generis, ou bien ces confusions et ces obscurités ne prouvent-elles pas plutôt qu’une « nature » qui comporte un tel désordre n’est pas une nature ? L’auteur nous laisse à choisir entre ces deux explications ; mais il ne cache pas sa prédilection pour la seconde.
Cette simple analyse, où n’ont pu entrer beaucoup de détails intéressants, montre assez clairement toutes les ressources d’un esprit à la fois très méthodique, très souple et très large. Le soin même que nous avons pris de suivre jusqu’au bout la démonstration contenue dans ce livre, est une marque non équivoque de l’estime où nous tenvons son auteur. Qu’il nous permette cependant quelques observations.
Nous ne pouvons croire que M. E. se soit proposé simplement de montrer que, en se plaçant successivement à divers points de vue, on peut arriver à confondre les concepts en apparence les plus distincts : il suffit évidemment de supposer également vraies les doctrines opposées des philosophes, pour être assuré de pouvoir prouver successivement qu’une seule et même classe de faits est à la fois le genre et une espèce d’une autre classe, c’est-à-dire qu’elles se confondent en une seule. Il n’est besoin ni de tant d’érudition, ni de tant d’ingéniosité, pour établir une pareille thèse ; elle est incontestable à priori. Cet ouvrage n’est donc pas, sans doute, un livre purement historique, c’est aussi un livre dogmatique.
Mais quel est, si je puis dire, le dogme accepté par M. E. ? Il est difficile de le savoir. M. E. ne cache pas son admiration pour Kant. C’est la classification kantienne des faits psychiques qu’il choisit comme cadre de son étude, et il blâme Herbart d’avoir méconnu la finesse de la psychologie de Kant ; il définit la connaissance avec Kant, une spontanéité, et c’est encore la théorie de Kant qu’il soutient en démontrant, dans un chapitre qui tient la moitié du livre, l’intellectualité de la psychologie. Les deux premiers tiers du livre nous faisaient croire que nous avions affaire à un criticiste. Mais le dernier chapitre et la conclusion sont d’un évolutionniste ; et puis la tâche même que s’était tracée. M. E., celle de montrer l’impossibilité de distinguer les diverses facultés, le refus de prendre l’âme ou le moi, pour une nature digne de ce nom, le dédain de l’expérience de conscience, l’usage fréquent de la physiologie, tous ces indices dénotent un parti-