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L’attention fait défaut ou est affaiblie dans toutes les conditions où il existe une dépression des forces, fatigue par décharges normales ou pathologiques (épilepsie), convalescence des maladies aignes, maladies chroniques, états neurasthéniques congénitaux ou acquis, hystéries héréditaires ou symptomatiques, enfance, vieillesse, etc. Elle fait encore défaut dans toutes les conditions où une partie de l’énergie se trouve dépensée en détail dans des décharges volontaires ou non, travail, excitation maniaque, chorée, etc.

Les oscillations physiologiques de l’attention ont elles-mêmes pour condition physique des oscillations de l’énergie motrice. M. Lombard a observé sur plusieurs sujets (trois sur neuf) des oscillations spontanées de l’énergie des contractions musculaires[1]. C’est encore la fatigue musculaire qui peut rendre compte de ce fait, que les effets de l’attention ne s’accroissent pas à mesure qu’elle se prolonge, tant s’en faut[2].

Les intermittences des sensations à leur limite inférieure, faciles à constater surtout pour l’audition (Urbantschich, Gellé), ont sans doute la même condition physiologique.

Dans quelques circonstances on pourrait croire que non seulement le mouvement n’est pas la condition de l’attention, mais que l’attention est capable d’empêcher un mouvement projeté. C’est ainsi que Holland[3] remarque que l’attention portée sur l’action d’avaler en entrave les mouvements, et Darwin a vu que l’éternuement peut être empêché par le désir de le voir se produire[4]. Mais dans ces cas le mouvement est empêché non pas par une diminution de l’activité motrice, mais par la contraction exagérée et spasmodique des muscles que l’on veut faire entrer en action. L’exagération des troubles de la motilité sous l’influence de l’attention chez les sujets qui sont atteints d’impotences congénitales ou acquises des muscles de l’articulation ne tient pas à une autre cause. On ne peut pas soutenir que dans ces cas de spasme fonctionnel, la contraction exagérée de certains muscles soit due à un défaut d’inhibition ; souvent on peut reconnaître l’existence de paralysies des muscles antagonistes.

La destruction de centres excitables entraîne la suppression des activités propres à ces centres ; cette économie d’activité profite aux centres restés intacts qui réagissent plus énergiquement. L’ablation

  1. Warren P. Lombard, The effect of fatigue on voluntary muscular contractions (The Amer. journ. of psychology, 1890, p. 41).
  2. G. Dwelshauvers, Psychologie de la perception et Recherches expérimentales sur l’attention, in-8o, Bruxelles, 1890.
  3. H. Holland, Chapters on mental physiology, 2 éd., 1858, p. 85, 86.
  4. Darwin, L’expression des émotions, p. 39.