Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XXX.djvu/539

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
525
p. regnaud. — origine des suffixes

mots, comment, en ce qui concerne le sanscrit, par exemple, taxer d’idéologie la méthode qui consiste à les reconnaître là où elles apparaissent en toute évidence ? Cette méthode est aussi simple et positive que possible ; elle consiste tout uniment à ouvrir les yeux et à les voir où elles sont, c’est-à-dire sous la forme de noms d’agents monosyllabiques, — nullement invariables, nullement indéclinables, comme le voulait Schleicher, nullement mystérieux et n’existant qu’à l’état d’hypothèse ou d’on dit, comme le prétend tel néo-grammairien, dont le nom m’échappe, — du genre de : jas (pour jans), celui qui engendre ou qui est engendré ; chid, celui qui coupe ; das, celui qui donne ; bhûs, celui qui est ; tap, celui qui échauffe, etc., etc. Du reste, le grec et le latin ont conservé ces mots racines tout comme le sanscrit : πλήξ, φλύξ, ρώξ, fex, dex, ceps, rex, mens, pax, etc., en témoignent. Quant aux formes correspondantes de la langue mère, il y a tout lieu de croire que celle qui précédait, par exemple, le sanscrit sthas et le latin stes (celui qui se tient debout) n’en différait guère que dans la mesure où l’antécédent de μάτηρ et de μήτηρ différait lui-même de celles-ci.

Les racines dont nous venons de rappeler la véritable nature étant les bases de la dérivation, il importait de présenter les observations qui précèdent avant de passer à celles qui suivent.

II

Au point de vue morphologique et eu égard aux racines, les langues indo-européennes se développent par la dérivation, c’est-à-dire par l’élargissement des formes au moyen de l’insertion d’un suffixe sur une base radicale. Il en est ainsi en latin de dic-us par rapport à dex, de fîc-us vis-à-vis de fex, etc.

Mais deux questions se posent tout d’abord : Quelle est la cause de l’élargissement ? D’où vient le suffixe ?

Dans certaines circonstances, alors que l’adjonction du suffixe comme dans le latin tenuis-simus, auprès de tenuis, a pour effet de modifier la fonction grammaticale du dérivé eu égard au primitif, la première de ces questions est d’une solution facile : simus, dans l’exemple cité, a été ajouté à tenuis pour pourvoir cet adjectif de l’idée de superlatif que la terminaison en question apporte avec elle.

Mais il est beaucoup d’autres cas — dicus, ficus, etc., se trouvent justement dans un de ceux-là — où l’élargissement n’apporte aucune modification soit dans la signification, soit dans la fonction grammaticale du primitif élargi. C’est ici qu’apparaît le problème