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lachelier. — théorie du syllogisme.

non seulement à cette figure, mais à la syllogistique tout entière : l’attribut qui est impliqué par un autre appartient à tout sujet dans lequel celui-ci réside ce dernier attribut : nota notæ est etiam nota rei ipsius[1].

Mais l’universelle négative n’est pas moins que l’universelle affirmative l’expression d’une loi : nous pourrons donc également appliquer la loi négative « Nul A n’est B » à un sujet donné ; nous pouvons donc aussi l’appliquer par avance à un sujet encore inconnu, que nous appelons provisoirement « quelque A ». Nous obtiendrons ainsi un syllogisme de la première figure, en Ferio :

Nul A n’est B :
or quelque A est A :
donc quelque A n’est pas B,


dans lequel il est facile de reconnaître la subalternation de l’universelle négative. Il est évident que le principe de ce syllogisme est, au fond, le même que celui du précédent : il suffit d’en modifier l’expression pour l’adapter aux cas où la majeure est négative : l’attribut qui est exclu par un autre est exclu de tout sujet dans lequel réside ce dernier attribut : repugnans notœ repugnat rei ipsi[2].

Revenons à l’universelle affirmative « Tout A est B », et considérons-la de nouveau comme l’expression d’une loi. Une loi n’est pas seulement susceptible de l’application directe dont nous venons de parler : elle comporte encore une autre application, moins naturelle, mais non moins rigoureuse, que l’on pourrait appeler indirecte et renversée. Dire que tout A est B, c’est dire que la notion A implique la notion B, et que la première ne peut être réalisée, dans aucun sujet, sans la seconde : mais c’est dire, par cela même, qu’un sujet qui ne possède pas l’attribut B, manque d’une condition indispensable pour posséder l’attribut A. Faisons d’abord cette application renversée de la loi à un sujet encore indéterminé, x ; et, comme tout ce que nous savons de ce sujet, c’est qu’il ne possède pas l’attribut B, appelons-le provisoirement « non-B ». Nous raisonnerons alors de la manière suivante, en Camestres :

Tout A est B :
or nul non-B n’est B :
donc nul non-B n’est A ;
et nous ne ferons autre chose, par ce raisonnement, que contraposer l’universelle affirmative « Tout A est B ». On pourrait croire encore ici, mais pour une autre raison que tout à l’heure, que la conclusion « nul non-B n’est A » résulte immédiatement de la proposi-
  1. Kant, über die f. Spitzfind. der 4 syll. fig., § 2.
  2. Kant, Ib.