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delbœuf. — le sommeil et les rêves

infiniment plus simple. S’il s’est compliqué, c’est que des couches de dépôt se sont peu à peu, en tout ou en partie, attachées au noyau d’une manière inséparable.

Dès lors, plusieurs questions se présentent : Comment se forme une couche de dépôt ? Quelles sont les couches qui, s’attachant au noyau, ne se légueront qu’à la descendance prochaine ? Quelles sont celles qui, se transmettant à la descendance éloignée, feront ainsi partie du patrimoine de l’espèce ? Comment s’opère la transmission ?

Ces quatre questions roulent sur l’analyse de deux fonctions générales, fondamentales et mystérieuses, la nutrition et la génération. L’étude du rôle de la nutrition nous révélera la cause du sommeil. L’examen de la loi universelle de la propagation des êtres vivants nous ouvrira des horizons lointains sur l’avenir réservé aux forces psychiques dans la nature.

II. — La nutrition et la cause du sommeil.

La première question à résoudre est celle-ci : Comment se forme une couche de dépôt ?

Il va de soi qu’au moment où elle se forme, c’est-à-dire quand elle est encore une couche de dépôt en puissance et non en acte, on peut la considérer comme une table rase, en se plaçant, bien entendu, au point de vue de l’être dont elle fait partie. C’est une plaque de photographie sensibilisée et prête à recevoir l’impression. En elle sont des forces libres qui peuvent devenir ceci ou cela ; les forces extérieures qui viendront la frapper sont libres aussi ; mais, du moment que le choc a eu lieu, elles ne sont plus libres ni les unes ni les autres, elles sont fixées : la plaque a reçu une empreinte, résultant de l’arrêt des rayons extérieurs qui sont tombés sur elle et qui s’y sont transformés. Car, pour sentir une chose extérieure, il faut en subir et, par conséquent, en fixer l’action dans une certaine mesure. L’empreinte n’est donc que le produit de la combinaison de deux sortes de forces, les unes appartenant à la substance sensible, les autres à la chose sentie. Celles-ci feront désormais partie de l’organisme, en tant que capable de sensation ; de physiques qu’elles étaient, elles sont devenues psychiques.

La couche qui était sensible a cessé de l’être[1] ; elle est devenue

  1. J’aurais voulu pouvoir me servir ici et ailleurs du participe sensibilisé, et dire que la couche sensible a été sensibilisée, de même que l’on dit d’une chose utile qu’elle a été utilisée. Mais, en photographie, on se sert du mot sensibi-