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F. - R.. — considérations sur la philosophie chimique

Pour mieux poursuivre l’examen des phénomènes généraux de la combinaison, prenons pour exemple la formation et la dissociation de l’eau. Soient trois vases à une température de 0°, contenant l’un de l’hydrogène, l’autre de l’oxygène, le troisième un mélange de ces deux gaz (2 vol. d’hydrog. et 1 vol. d’oxygène). Soumettons simultanément ces trois vases à Faction d’une température croissante, jusqu’à 100 degrés d’abord. À ce moment, les trois masses gazeuses se seront dilatées (ou bien, le volume restant constant, la pression aura augmenté), la température, c’est-à-dire la force vive des molécules, aura subi un accroissement. Si alors la température s’abaisse graduellement pour revenir à 0°, les trois masses gazeuses, repassant successivement par les mêmes états, mais en sens inverse, reprendront un volume, une pression, une température identiques à ceux du début de l’expérience.

Chauffons de nouveau nos trois vases à une température voisine du rouge, l’oxygène et l’hydrogène se comporteront de la même manière que précédemment ; mais, dans le vase contenant le mélange des deux gaz, un phénomène nouveau se produira ; une force nouvelle, la force chimique, entrera en jeu tout à coup ; les molécules d’hydrogène et d’oxygène se briseront de telle sorte que les atomes qui les composent s’uniront pour former de nouvelles molécules, composées chacune d’hydrogène et d’oxygène, qui seront des molécules d’eau. Ramenons de nouveau à 0° les trois vases ; l’hydrogène du vase A et l’oxygène du vase B, repassant par les mêmes états, reviendront à leur état initial ; tandis que dans le troisième vase une modification radicale se sera produite. À 300°, la pression ou le volume ont diminué d’un tiers : à 100°, on verra de la vapeur d’eau se condenser ; de 100° à 0°, au lieu d’avoir un mélange gazeux, nous aurons un corps liquide, lequel deviendra solide à 0°. C’est que dans ce cas il s’est accompli un phénomène chimique, non réversible, c’est-à-dire la combinaison de l’oxygène et de l’hydrogène[1].

Portons maintenant la température au rouge blanc. Les atomes qui constituaient la vapeur d’eau vont se séparer de nouveau et former de nouvelles molécules d’oxygène et de nouvelles molécules d’hydrogène. Quand cette séparation sera complètement effectuée (résultat que l’expérience n’a pas atteint, mais que nous supposons pour plus de simplicité), l’état physique sera redevenu identique dans les trois vases. Ce phénomène de séparation est précisément l’inverse du phénomène de combinaison qui avait eu lieu

  1. M. Berthelot a insisté avec raison sur ce caractère qui distingue mieux que tous les autres, les phénomènes chimiques non réversibles, des phénomènes physiques toujours réversibles.