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F. - R.. — considérations sur la philosophie chimique

ment contredit par l’expérience. Relativement à la loi du carré des distances, on pourrait présenter des observations analogues.

Au point de vue expérimental, l’affinité se manifeste par la formation des corps composés, c’est-à-dire par la destruction de deux molécules homogènes, dont les atomes s’unissent pour former deux molécules hétérogènes (voir plus haut le schéma de la formation de l’acide chlorhydrique).

Un grand fait domine toutes les manifestations de l’affinité. Toutes les fois que deux corps, en vertu de leur affinité réciproque, se combinent, on observe un dégagement de chaleur, d’électricité et quelquefois de lumière ; ce qui indique que l’énergie interne du système a diminué d’autant. Elle est moindre par conséquent dans l’état final que dans l’état initial.

Ces faits et leur expression thermo-dynamique ont été mis en lumière, démontrés et érigés en lois scientifiques principalement par M. Berthelot, qui a posé ainsi les bases de la mécanique chimique.

M. Berthelot a pu donner cette loi générale que l’affinité de deux corps qui se combinent est mesurée par la quantité de chaleur qu’ils dégagent en se combinant. Cette proposition est fondamentale ; mais, comme nous aurons l’occasion d’y revenir plus tard, à propos des lois générales de la chimie, nous ne ferons ici que la mentionner.

Il est bien évident que l’affinité de deux corps est fonction de leur température. L’expérience de chaque jour nous l’apprend. Le carbone, à la température ordinaire, est un corps presque inerte, tandis qu’à 1000° il brûle spontanément dans l’oxygène. A mesure que la température s’abaisse, l’affinité des atomes (probablement leur mouvement) diminue d’intensité, si bien qu’on peut concevoir qu’au zéro absolu ( —273°) il n’y a plus aucune affinité réciproque des corps, la vitesse de leurs mouvements moléculaires devenant nulle. Par conséquent, on ne peut comparer l’affinité de plusieurs corps qu’en la mesurant aux mêmes températures. Il faut aussi, autant que possible, observer le corps dans le même état physique (de préférence l’état gazeux qui est l’état de parfaite homogénéité).

La conséquence générale de ces faits est que les propriétés du composé diffèrent de celles des composants. La mécanique chimique rend compte de cette différence, en montrant que l’énergie totale du système formé est différente de la somme des énergies du système initial. Tel est le caractère essentiel qui distingue la combinaison du simple mélange, si intime qu’il soit : c’est la définition même du phénomène chimique dans sa conception la plus générale, et nous pouvons formuler cette loi. Tout phénomène qui a amené une modi-