Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXI, 1886.djvu/81

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
77
notes et discussions


RÉPONSE A M. G. LECHALAS.

L’expérience du renversement volontaire d’un cercle apparent — que j’aurais pu, que j’aurais dû peut-être intituler : Expérience de pseudoscopie volontaire — a été, comme je l’espérais, facilement vérifiée. Mais M. Lechalas propose à mon énoncé et à mes figures plusieurs corrections. La première est de pure forme. J’admets volontiers les deux autres ; pourtant je ne constate avec évidence l’agrandissement du cercle apparent que dans un cas : c’est quand je regarde le verre de très haut et que son ouverture apparente est dirigée vers le sol à ce point qu’il ne pourrait, debout, contenir une seule goutte d’eau. Au reste, sur les deux points en litige, le débat pourrait être tranché, ce me semble, par une démonstration géométrique ; la simple observation ne saurait fournir des renseignements suffisamment précis et concluants.

Je n’ai d’ailleurs pas assez insisté sur la théorie de ces phénomènes de renversement, me bornant à les décrire et à en tirer une conclusion. Puisque M. L. m’en fournit l’occasion, je vais essayer de réparer cette omission :

L’ellipse dessinée sur la rétine est un signe que notre esprit doit interpréter d’après ses idées préconçues, c’est-à-dire d’après son expérience. L’élément fixe et inébranlable de l’interprétation, c’est que l’ellipse représente le bord circulaire d’un verre transparent, dont la base, quelle qu’elle soit, est circulaire et parallèle au sol. Cela posé, l’ellipse a encore deux significations possibles ; car le cercle en question a, d’après notre expérience acquise, deux positions possibles, deux seulement. De ces deux positions, l’une est très probable, l’autre peu probable, la première s’accordant avec notre expérience la plus fréquente, la seconde ne s’accordant qu’avec quelques rares observations ou même avec une possibilité de construction purement théorique. De plus, la première s’accorde mieux avec le visum, quand la vision n’est pas troublée par une fixation prolongée. De là l’interprétation ordinaire, qui est la bonne : un cercle parallèle à la base du verre, et qui est, ou la base d’un cône renversé, ou le sommet d’un cylindre. L’autre interprétation, l’interprétation pseudoscopique, laquelle n’a lieu que si on veut la substituer à la première, est un cercle oblique ou perpendiculaire à la base du verre et plus grand (selon M. L.) que n’était le cercle parallèle à cette base (c’est ici qu’un peu de géométrie viendrait peut-être utilement pour déterminer la position et la grandeur apparentes du nouveau cercle). L’interprétation exacte, qui est habituelle et involontaire, a encore pour elle qu’elle est toujours la même, quelle que soit la position de la tête par rapport à l’objet, que l’objet soit en bas ou en haut, plus ou moins bas ou plus ou moins haut,