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ANALYSES ET COMPTES RENDUS


Intelligence des animaux : anecdotes et faits, in-12. Paris, 1886.

La Revue scientifique avait, comme on le sait, ouvert une enquête sur l’intelligence des animaux, et elle a eu l’excellente idée de réunir en un volume élégant les documents qu’elle a recueillis. Ainsi que le dit la préface, ce volume n’a pas de prétentions philosophiques. C’est un recueil de fait personnels, peut-on dire, bien observés et simplement racontés. Beaucoup de monde y a collaboré. À côté de noms plus ou moins inconnus, voire de simples initiales, on y voit des membres de l’Institut comme M. De Lacaze-Duthiers, des médecins, des naturalistes, des philosophes, des chasseurs, des touristes. N’y cherchez pas de l’unité ni un système. — Je me trompe : on y démêle visiblement une tendance commune à rapprocher les animaux de l’homme : tendance inconsciente, mais bien naturelle. La plupart des signataires relatent les faits et gestes de leurs commensaux, qui de son chien, qui de son chat, qui de son perroquet ; et quiconque vit avec les bêtes et les aime, leur prête infailliblement le sentiment, l’intelligence, même un langage, et, en manière de conclusion, finit toujours par assurer qu’il ne leur manque que la parole.

À ce titre, ce petit livre concourt, dans une mesure, si faible soit-elle, à battre en brèche « le règne humain ». Car tout est dans tout. Cet axiome n’a jamais été plus vrai qu’aujourd’hui, principalement dans le domaine philosophique. Y avait-il au monde une question en apparence mieux circonscrite que celle de savoir si les animaux pensent ? Il semblait, quand on y avait répondu par un oui ou par un non, qu’il n’y avait plus rien à ajouter. Ainsi avait-on fait depuis l’antiquité jusqu’à nos jours. Mais, dans la seconde moitié du xixe siècle, s’est définitivement établie sur des bases scientifiques une doctrine qui a fait rapidement son chemin, la doctrine de l’évolution. Suivant elle, toutes les espèces animales dériveraient d’un petit nombre de types, sinon d’un type unique ; et l’homme lui-même ne serait que le descendant perfectionné d’un singe anthropomorphe.

S’il en est ainsi, force est bien d’accorder ou de refuser l’intelligence à tous les animaux, y compris l’homme. Ne se développe en effet que ce qui est en germe. Or, si nous descendons des monères, nous ne