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ANALYSES.p. andré. La vie du R. P. Malebranche.

pas moins objectivement. Ils lui sauront gré cependant d’avoir fait des efforts, et des efforts souvent heureux pour sortir de l’ornière commune. La métaphysique que l’auteur nous propose est franchement pluraliste ; il est plus frappé des différences qui séparent les phénomènes que des ressemblances qui les rapprochent. Certaines tendances lui sont donc. communes avec les représentants du nouveau criticisme. Pourtant M. Bertauld est encore loin d’adhérer à cette philosophie. D’abord il est substantialiste. Les principes qu’il invoque pour expliquer le monde, sont des essences, des entités. En outre, il n’admet d’autre certitude que la certitude scientifique, fondée sur l’évidence objective, d’autre probabilité que la probabilité scientifique, d’autres hypothèses que les hypothèses scientifiques. À ses yeux, la méthode de la métaphysique ne diffère pas sensiblement de la méthode des sciences positives. Les réalités métaphysiques étant les plus difficiles à connaître, les inductions métaphysiques sont affectées d’un coefficient d’incertitude qui les fait descendre au rang d’hypothèses. On croit à l’existence de Dieu comme à celle des atomes ; ce sont là deux croyances du même genre. Un jour viendra-t-il où ces probabilités se changeront en certitude ? M. Bertauld n’ose l’espérer, mais il n’en désespère pas non plus. Le dogmatisme philosophique, attitude condamnée dans le présent, sera donc celle des philosophes de l’avenir ? Là-dessus M. Bertauld évite de se prononcer et c’est parce qu’il évite de se prononcer qu’il nous est impossible de savoir exactement quel est le groupe de penseurs auxquels il se rattache. Pour si autodidacte que l’on soit, on est toujours d’une école, on procède toujours d’un ou de plusieurs maîtres. M. Bertauld dissipera sans doute nos incertitudes quand il publiera son quatrième volume.

Lionel Dauriac.

Le P. André. La vie du r. p. Malebranche, publiée par le P. Ingold. Paris (Bibliothèque oratorienne), Poussielgue, 1886, in-18, XVIII-430 p.

Victor Cousin, dans son introduction aux Œuvres philosophiques du P. André, puis MM. Charma et Mancel, dans leur grand ouvrage sur le célèbre jésuite, ont publié de nombreux documents sur la Vie de Malebranche qu’avait écrite son fidèle disciple. On savait ainsi que, après la dissolution de son ordre, André était rentré en possession de ses papiers et avait pu reprendre son œuvre favorite, et que, après sa mort en 1764, son ami M. de Quens avait trouvé la Vie de Malebranche, écrite en entier de sa main. Confié à M. Coquille, bibliothécaire de la Mazarine, l’ouvrage du P. André fut donné par lui, en 1807, à l’abbé Hemey d’Auberive, qui devait en faire la publication : celle-ci n’eut pas lieu, et toute trace du manuscrit disparut.

Cependant M. l’abbé Blampignon eut le bonheur de reconnaître, dans