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prendre une révolution qui se proposait la réforme de tous les abus, de toutes les erreurs, et la conversion à de nouvelles doctrines de deux classes d’hommes qui ne changent pas volontiers d’opinion, les philosophes et les médecins. Quant aux théologiens, il n’y fallait pas songer, surtout depuis le concile de Trente.

Deux sonnets pour un ouvrage sans précédent, ce n’est pas beaucoup en vérité, si l’on songe que la plupart des auteurs contemporains n’osaient se présenter au public qu’avec une douzaine au moins de recommandations complaisantes en vers et en prose. Il y a tel ouvrage de cette époque qui renferme jusqu’à trente et quarante pièces élogieuses.

À la suite d’un index des matières contenues dans son ouvrage, l’auteur a soin de décliner encore une fois ses noms et prénoms, avec le lieu de sa naissance, vecina y natural de la ciudad de Alcaraz. Au verso du feuillet, un court avant-propos au lecteur l’avertit de ne juger l’auteur qu’après avoir lu consciencieusement son livre. Les médecins en particulier sont priés de ne point précipiter leur jugement, et de compter un peu plus qu’ils ne font sur le temps, qui découvre tant de choses inconnues ; car ce que les hommes savent est peu en comparaison de tout ce qu’ils ignorent ; de sorte qu’il est bon de faire taire l’envie, la jalousie et l’intérêt, pour laisser la vérité circuler librement au profit de tous.

Voilà, à peu près, tout ce qu’il a été possible de recueillir sur la personne de l’auteur. D’après une tradition qui s’est perpétuée dans sa ville natale d’Alcaraz, on croit qu’elle y exerça le médecine, et l’on montre encore deux ou trois édifices publics qui ont été bâtis par sa famille. Son père était probablement médecin.

La question d’identité et d’authenticité étant traitée, il reste à faire l’analyse critique de la nouvelle philosophie de la nature humaine.

II

Ce n’est qu’en 1707 que l’Inquisition s’avisa de supprimer quelques passages de la Philosophie nouvelle, comme il appert de l’approbation donnée à la quatrième édition par le qualificateur du Saint-Office, le 24 mai 1728. La censure de la congrégation de l’index fut ponctuellement observée, si bien qu’il ne se rencontre peut-être pas en Espagne un seul exemplaire des deux éditions de 1588 et de 1622 qui ne soit couvert de ratures aux endroits marqués par la griffe inquisitoriale. L’auteur d’une étude littéraire sur Dona Oliva Sabuco, M. Julian Sanchez Ruano, a eu beaucoup de peine à rétablir