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G. LE BON.applications de la psychologie

culte des serpents ; et l’on peut croire que les singes qui prêtèrent à Rama un fort utile concours furent les populations primitives.

Cette expédition des Aryens dans le sud de l’Inde fut beaucoup plus d’ailleurs une marche militaire qu’une invasion, et elle ne laissa guère de traces dans le pays envahi.

Au iie siècle de notre ère se produisit la première invasion touranienne qui appartienne à l’histoire ; ce fut celle des Scythes, suivie, dans le courant du ive siècle, par celle d’un nouveau peuple, probablement aryen, ou du moins de famille aryenne, les Rajpouts.

Ces Rajpouts, ou fils de rois, ainsi que le signifie leur nom, guerriers vaillants, tous égaux entre eux, se firent reconnaître comme Kchatryas, et s’établirent dans le pays qui s’étend à l’est de l’Indus jusqu’au delà des Aravulli, et’qui s’appelle encore aujourd’hui le Rajpoutana.

Nous avons vu que dans le nord-est et dans l’est de l’Inde les invasions venues par la porte touranienne avaient fait prédominer la race jaune, qui s’était mêlée plus ou moins aux nègres, et avait subi plus tard, dans le bassin du Gange et dans le sud du Dekkan, le contact des Touraniens. Nous résumerons de même les résultats des invasions arrivées jusqu’au ixe siècle de notre ère par la porte aryenne, en disant qu’elles livrèrent le nord-ouest et l’ouest de l’Inde aux races touraniennes, soumises bientôt à une élite aryenne, et produisirent, ainsi que nous l’avons indiqué, des effets moraux absolument distincts des effets physiques et matériels.

Si, partant du nord pour la région occidentale, comme nous l’avons fait pour l’orientale, nous considérons le Pundjab, nous voyons que les Jâts, les Goujars et les Sikhs, qui paraissent être des peuples touraniens, forment plus des trois cinquièmes de la population, et que le reste seulement se rapproche, par la couleur de la peau, des Aryens. Plus bas, nous trouvons les Rajpouts, qui se rattachent à la famille aryenne, mais n’en sont point une branche pure. La population du Guzerat est très mêlée, mais les Touraniens y dominent. Les plateaux élevés que renferme au sud le bassin du Gange, et les monts Vindhya auxquels ils touchent, marquent la limite de l’élément aryen. Il disparaît presque entièrement au-dessous de cette région ; mais s’il n’intervient plus dans l’apparence extérieure des peuples, les institutions et les croyances aryennes restent souvent prépondérantes. Au delà de Bombay, sur le double flanc des Ghats, est établi un peuple belliqueux, dont le rôle fut très important, les Mahrattes, d’origine touranienne, au nombre de plusieurs millions. À mesure que l’on s’avance vers le centre ou que l’on descend vers le sud, la civilisation aryenne et la physionomie touranienne se fondent de plus